LA COMPETENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE

 

Dans la mesure où il existe deux ordres de juridiction, la compétence a toujours suscité des difficultés et si les problèmes sont résolus, il a fallu attendre 1980 pour que la juridiction administrative soit dotée d'un statut constitutionnel qui la met à l’abri par une simple loi (CC, 22.07.1980) complété par CC,22.01.1987 et CC,22.07.1989 où ce dernier indique quelle est la compétence naturelle de la juridiction administrative.

Conformément à la conception française de séparation des pouvoirs figure au nombre des principes fondamentaux des lois de la République, celui selon lequel l’annulation et la réformation des décisions prises dans l’exercice des prérogatives de puissances publiques dans les diverses autorités administratives. Le Conseil Constitutionnel a précisé que les deux ordres de juridictions ont des compétences propres : celles de la juridiction judiciaire résulte de la constitution elle-même (article 86 : protection de la liberté).

Celle des juridictions administratives résulte du principe à valeur constitutionnelle que lui réserve le contentieux de l’annulation et la réformation des actes administratifs, mais le législateur peut attribuer une matière en totalité à l’un ou l’autre des deux ordres de juridictions dans l’intérêt de la justice, à condition de ne pas vider le principe de sécurité de sa substance.

La compétence a d’abord été définit de façon négative : à partir du principe de séparation, qu’à été défini la compétence du juge administratif, il ne s’agissait pas de dire que telle matière appartient à telle juridiction. Pendant longtemps apparu comme une exception qu’il fallait interpréter de façon restrictive, celui de l’état débiteur tiré de texte révolutionnaire, celui des actes d’autorités opposées aux actes de gestion relayés par le critère de la gestion publique qui a donné naissance au critère de service public mais ce n’est pas satisfaisant. Maintenant, les juridictions administratives sont compétentes pour statuer sur les litiges d’« ordre interne administratif » (Vedel et Devaulvet).

§1. Les litiges d’ordre interne.

Les juridictions administratives sont des juridictions d’ordre interne : juridiction de droit interne (certes les règles de droit international constituent des sources de légalité) mais le juge ne met en oeuvre le droit international que dans la mesure où il est incorporé au droit interne. Les juridictions administratives sont pleinement compétentes pour tous les litiges qui ne mettent en causes que les questions d’ordre interne.

Dans certains cas, un doute peut cependant surgir : activité d’autorité française qui comporte des aspects internationaux : le Conseil d'Etat conclut à la compétence du juge administratif dès lors que seules des questions de droit interne doivent être traitées devant lui. L’exercice d’une activité n’empêche pas de rattacher cette activité à l’ordre interne.

La juge administratif sera compétent si un consul de France à l’étranger refus un passeport, c’est une question de droit interne. En revanche, il n’est pas compétent pour les litiges qui concernent l’ordre international. D’abord en ce qui concerne les activités d’autorités étrangères : un ressortissant belge ne peut pas contester devant un tribunal français un commandement à payer bruxellois.

Le Tribunal des Conflits dans sa décision du 02.02.1950, Radio Diffusion Française, à propos d'un acte pris par le président de la République française en tant que coprince d’Andorre. De même pour les relations internationales de France : négociation, adoption, signature échappe à la compétence du juge administratif français. De même, le juge administratif ne peut pas connaître du refus de protection diplomatique.

§2. Les litiges d’ordre administratif.

Le juge administratif est juge de l’administration et juge de droit administratif. Le juge administratif appartient à l’administration. L’évolution a conduit à bien séparer les juges administratifs de l’administration. Il existe des liens entre le juge administratif et l’administration. Le juge administratif et le juge de l’administration.

On rejoint un autre aspect, le juge et le juge de droit administratif. Il juge les litiges qui mettent en cause l’application de ce droit administratif : relation entre la compétence juridictionnelle et le fond du droit. Il faut donc identifier le champ d’application et le droit administratif pour déterminer la compétence du juge administratif.

Le juge administratif juge d’abord tout le contentieux des activités de l’administration. C’est la solution facile lorsque l’activité en cause et celle d’organe ou d’autorité administrative (activité ministérielle, service déconcentré, collectivité territoriale...). La compétence s’étend ensuite à des organes qui remplissent des fonctions administratives mais qui n’appartiennent pas à la structure administrative.

Certains relèvent de l’institution étatique. Il s’agit de fonction extérieure à l’administration qui relève de l’exécutif ou d’autorité indépendante. Dans la mesure où ces organes exercent des mesures administratives, ce principe emporte des conséquences importantes parce que le juge administratif connaît des activités administratives d’autorités judiciaires (organisant le service public judiciaire qui relève des juges administratifs). De même pour les activités administratives d’organe parlementaires concernant le personnel administratif de ces assemblées.

Le juge administratif connaît le litige qui soulève le fonctionnement d’organisme privé chargé de gérer un service public : organe de droit privé qui participe à l’action administrative. Dans cette mesure la compétence appartient au juge administratif (Tribunal des Conflits,68,Cie Air France contre Epoux Barbier). Enfin, lorsque l’administration n’est pas soumise au droit administratif, soit parce qu’elle n’exerce pas une mission de service public soit parce que poursuivant un but de service public, elle le fait dans les conditions de droit commun, elle n’est pas soumise à la compétence du juge administratif mais elle relève de la compétence des juridictions judiciaires (Conseil d’Etat, Granite Porphyroïde des Vosges, 1912).