LE REGIME JURIDIQUE DU CONTRAT ADMINISTRATIF

 

Les textes et la jurisprudence empruntent certains traits de droit privé comme condition de validité dans les contrats. Le droit écrit réglemente les conditions de conclusions des contrats de droit public et de droit privé. Toutes les règles applicables sont réunies dans le code du marché public. Cependant, les textes ne prévoient pas tout, la jurisprudence précise les conditions d’engagement de la responsabilité contractuelle.

Les règles varient. Les parties sont libres de choisir dans le respect de la loi toutes les modalités de l’accord qui sera réalisé. Pour tout, la volonté de l’administration n’est jamais entièrement libre même pour le contrat de droit privé comme l’intérêt général. Dans le contrat administratif, la personne publique bénéficie d’une prééminence.

§1. La formation du contrat.

Le code des marchés publics distingue deux catégories de contrats de l’administration :

A.    Les limites à la liberté de contracter de l’administration.

Qui dispose de la capacité de contracter ?

Comment l’administration peut choisir son cocontractant ?

Pour la capacité de contracter, il faut qu’une personne signe un contrat à la place de l’autorité administrative. Seules les personnes morales de droit public peuvent contracter. Pour tous les services non personnalisés, contractant avec l’état, les textes déterminent pour chaque personne publique les autorités compétentes pour les engagés, la procédure à suivre... Les textes limitent aussi la possibilité de choix entre le contrat de droit privé et le contrat de droit administratif. Ces règles de forme et de compétence sont importante. Ainsi, le maire a compétence pour signer les contrats au nom de la commune. Les textes permettent parfois au maire de déléguer la signature dans cette hypothèse, sinon, elle est illégale.

Pour le choix du cocontractant, l’administration a rarement le choix. Cette liberté n’existe que dans les contrats où l’intuitu personnae joue un rôle essentiel comme dans cas de concessions de service public. Il y a deux règles :

L’autorité compétente a le droit donc d’apprécier compte tenu de l’objet du marché, de son importance, de sa durée d’exécution considérant qu’il faut privilégier la qualité ou l’économie.

Il y a différents modes de passation des marchés publics :

* L’adjudication : procédé traditionnel de passation des marchés. Il a trois caractéristiques : la publicité, la concurrence et l’automatisme. Dans ces avis, parfois publiés, l’administration informe de l’objet des marchés qu’elle propose ainsi que les conditions. Il indique aussi la mise à prix, les sommes au-dessus de laquelle l’administration n’acceptera pas de contracter. Cette publicité assure la concurrence. Tous les intéressés vont répondre aux propositions de l’administration en soumissionnant par écrit. Une fois expiré le délai, les enveloppes ouvertes par le bureau d’adjudication, le marché est attribué au candidat au prix le plus bas. Le bureau vérifie si les candidats répondent aux conditions légales ou à la réglementation pour contracter avec l’administration. Chaque soumissionnaire est lié par sa soumission dès le dépôt de celle-ci. Si malgré lui, on lui attribue le marché, le soumissionnaire ne peut pas le refuser sans commettre une faute engageant sa responsabilité. L’administration n’est liée qu’à compter du moment où l’autorité compétente pour signer le contrat approuve le résultat de l’adjudication. L’administration reste toujours libre avec l’adjudicataire. Il existe deux modalités :

* L’appel d’offre : il suppose la publicité et la mise en concurrence. Il peut être ouvert ou restreint. Il n’existe pas d’automatisme du choix du cocontractant, l’administration dispose d’une liberté de choix plus grande. Les candidats disposent d’une soumission mais l’offre est ouverte en séance non publiée et l’administration choisit l’offre la plus intéressante. Elle prend en considération les garanties professionnelles du candidat. L’administration peut organiser un concours pour éclairer son choix : cf. le marché d’architecture. L’administration doit respecter l’égalité entre tous les candidats. L’administration doit examiner toutes les offres, on ne peut pas écarter une offre, sans l’avoir examiner. Le bureau d’appel d’offre va faire une proposition à l’autorité compétente pour contracter donc l’administration reste libre. Cependant, si l’administration contracte, elle doit le faire avec le candidat dont l’offre a été retenue. Dès qu’un candidat a proposé une offre, il est lié. L’administration doit respecter l’égalité entre les candidats et donc engage sa responsabilité si elle évince illégalement certains candidats. Le candidat aura droit à dommages et intérêts s’il apporte la preuve qu’il a perdu une chance sérieuse d’apporter le marché. Le Conseil d'Etat indique que l’administration ne peut pas créer une discrimination sans rapport avec la réglementation des marchés et selon l’arrêt de Juillet 1994, le Conseil d'Etat déclare illégal l’attribution préférentielle dans un marché aux entreprises locales.

* Les marchés négociés : il faut voir les marchés de gré à gré, l’administration met en compétition tout ce qu’elle estime apte à exécuter correctement les marchés. Il n’y a pas de formalisme mais un libre choix du cocontractant. Une mise en concurrence doit cependant être organisée. Ce marché négocié peut-être passé lorsque l’administration n’a pas la possibilité de choisir. Lorsqu’il est nécessaire d’utiliser un brevet d’invention. Ces marchés négociés prévoient un risque de favoritisme donc le code prévoit toutes les hypothèses dans lesquelles on peut y recourir. Pendant longtemps, le procédé habituel de passation dans le marché était l’adjudication ouverte. Le problème est la possibilité de fausser la concurrence surtout quand les professionnels s’entendent entre eux. L’autre différence est que l’offre la plus basse n’est pas forcément la plus avantageuse. C’est pourquoi depuis 1956 pour l’état, et depuis 1971 pour les collectivités locales, l’adjudication et l’appel d’offre ont été mis sur pied d’égalité. Dans la pratique, cela relève d’une régression de l’adjudication. La concurrence est beaucoup plus réglementée et le traité de Rome organise la mise en concurrence dans l’entreprise au sein de la C.E.E. pour tous les marchés de travaux et de fournitures dépassant certains montants. La loi de Janvier 1992 transpose en droit interne la directive de 1989 qui prévoit une procédure de suspension de la passation dans les marchés qui apparaissaient comme illégaux au regard du droit communautaire mais on constate des différences entre la pratique et la théorie.

Toutes les atteintes à l’égalité pour les candidats, les stipulations contractuelles quand il y a une passation du contrat privé de l’administration, sont discutées. Mais en pratique, c’est un contrat d’adhésion. Dans le contrat administratif, au contraire la fixation unilatérale des clauses pour l’administration est la règle. Il y un cahier des charges annexé au contrat proprement dit qui définit les conditions. Dans les marchés, il comprend deux séries de documents : les documents généraux et les documents particuliers. Les documents généraux sont valables pour tous les marchés d’une même catégorie : cahier des clauses administratives générales et le cahier des clauses techniques générales.

Le premier fixe les dispositions applicables à tous les marchés de même nature passé pour un service. Les documents sont permanents. Ils n’ont aucun caractère réglementaire, leur force obligatoire provient de leur incorporation à un contrat donné. Le second fixe les dispositions techniques applicables à tous les marchés d'un service portant sur des travaux ou des fournitures de même nature. Les documents particuliers fixent les clauses administratives et techniques applicables à chaque marché.

§2. L’exécution des contrats administratifs.

A.    L’exécution normale du contrat.

L’administration a le droit d’exiger de son cocontractant l’exécution de ses obligations telles qu’elles sont prévues au contrat. Le cocontractant doit exécuter personnellement son contrat. Cependant, il est admis que le cocontractant puisse faire appel à des sous traitants, ce qui entraîne que le contrat est passé entre les sous traitants et les entrepreneurs.

Ces contrats sous traités doivent être autorisé par l’administration. La seule hypothèse dans laquelle le contractant est délié, est celle de la force majeure définie traditionnellement par l’élément antérieur et imprévisible. Si la force majeure fait disparaître l’objet même du contrat, il est résilié de plein droit. Dans les autres cas, le cocontractant pourra se prévaloir de la force majeure pour demander au juge de résilier celui-ci.

Quelles sont les prérogatives de l’administration ? Elle a toujours le droit de diriger ou contrôler les opérations d’exécution, elle peut exiger de lui tous les renseignements utiles s’agissant de travaux publics de l’Etat, les ingénieurs dans les ponts et chaussés ont le libre accès aux chantiers selon l’ordre de service à l’entrepreneur. L’administration peut imposer des modalités d’exécution non prévues au contrat. Elle peut aussi contrôler la mise en œuvre des matériaux. Elle peut modifier unilatéralement les obligations de son cocontractant et augmenter les prestations prévues à l’origine et les diminuer. Elle dispose d’une prérogative exorbitante de droit commun. L’administration le peut dans les contrats administratifs.

Les exigences de l’intérêt général peuvent varier. Elle ne saurait être mise en échec par des règles immuables. L’administration peut réduire, accroître les obligations de ses cocontractants. Cette règle a été posée par le Conseil d’Etat dans l’arrêt du 10.01.1902, Gaz de Ville les Rouen, où des contrats avaient été passés entre la ville et les concessionnaires d’éclairage devant éclairé à l’origine grâce au gaz. Avec l’apparition de l’électricité, la ville décide de changer l’éclairage, il y a alors modifications dans tous les contrats de concession pour obliger les concessionnaires à s’adapter.

Or cela nécessite des travaux importants et des frais financiers lourds et dans un premier temps, la concession a refusé de modifier le contrat. Le Conseil d'Etat a décidé que l’administration cocontractante peut modifier unilatéralement le contrat ayant-droit à une indemnité représentant les frais supplémentaires, mais si le concessionnaire refuse la modification, celle-ci peut résilier le contrat c'est à dire y mettre fin sans réserver d’indemnité, un nouveau contrat sera alors fait.

On trouve la même solution dans l’arrêt du Conseil d'Etat, 21.03.1910, Cie générale des tramways où une ville en extension peut imposer à un concessionnaire de transport de créer une nouvelle ligne. Cette règle revêt une portée générale affirmée dans l’arrêt du Conseil d'Etat, 02.02.1983, Union des transports publics urbains.

Cependant, l’utilisation de ce pouvoir est enfermée dans certaines limites par le juge, ce qui s’explique puisque le contrat n’aurait plus aucune valeur. La modification unilatérale du contrat doit être fondée sur la nécessité d’adapter le service à une situation nouvelle. Au delà d'un certain volume de modification, le cocontractant peut demander au juge de résilier le contrat. S’il estime qu’il n’est plus apte, il peut demander de résilier le contrat.

La dernière limite est que l’administration ne peut jamais modifier unilatéralement les avantages financiers accordés aux cocontractants. En tout état de cause, en cas de modifications unilatérales, le cocontractant a droit à une contrepartie financière. Si l’administration demande à un entrepreneur de faire des travaux, il a le droit d’obtenir le paiement pour la différence.

Toutes ces mesures prisent par l’administration sont en principe insusceptibles d’être annulées par le juge administratif. Elles ouvrent seulement droit si elles sont injustifiées au versement de dommages et intérêts. Ce principe remonte au 19ème siècle et il est maintenu fermement par la jurisprudence. Dans l’arrêt du Conseil d'Etat, du 24.11.1972, Société de Nettoyage de Fontainebleau, la modification la plus grave est la résiliation du contrat. Si l’intérêt général commande la résiliation, le cocontractant n’est pas compétent pour annuler la résiliation du contrat.

Ce principe connaît une dérogation dans l’hypothèse de contrats qui entraînent pour le cocontractant d’importants investissements financiers. C’est le cas des concessions d’autoroutes où l’on fait des frais importants. Dans ce genre de concession, le cocontractant se rembourse de ces dépenses grâces aux redevances versées aux usagers. Il est nécessaire qu’il ait exploité ces autoroutes suffisamment longtemps. Il est impossible de résilier le contrat tant que le cocontractant n’a pas récupérer ses frais.

B.    L’hypothèse de faute dans l’exécution du contrat.

Il n’est pas exécuté normalement, l’une des deux parties commet une faute dans ses obligations contractuelles.

@. Si c’est l’administration qui a commis une faute.

Le particulier est tenu à continuer de faire ses obligations (exception au droit commun). Le cocontractant peut seulement saisir le juge administratif et en cas de faute très grave de l’administration, le cocontractant peut demander de résilier le contrat au tort de l’administration.

@. Si c’est le particulier qui a commis une faute.

Le cocontractant de l’administration peut commettre toutes sortes de fautes :

Il y a des gammes de sanctions en cas de commissions d’une de ces fautes. Les sanctions sont orientées vers la réparation du dommage subi et dans l’exécution effectivement correcte du contrat. Ces sanctions lui appartiennent de plein droit même si elles ne sont pas prévues par le contrat. L’administration peut toujours adapter les sanctions non appropriées aux manquements. Ce principe résulte d'un arrêt du Conseil d'Etat, Desplanques du 31.05.1907 où l’administration applique la sanction unilatéralement sans avoir à saisir le juge. L’administration sanctionne après la mise en demeure dans un délai fixe : c’est le privilège du préalable qui réapparaît et la décision exécutoire caractéristique de puissance publique.

L’exercice des prérogatives constitue une obligation pour l’administration, le juge interdit à l’administration d’y renoncer. Si l’administration saisissait le juge, on rejetterait la demande comme irrecevable. Ce principe ne connaît qu’une exception en matière de concessions de services publics : la déchéance du concessionnaire qui peut être prononcée par le juge et qui s’explique par la gravité. Que peut faire de son côté le cocontractant sanctionné ? Il peut simplement saisir le juge pour lui demander l’indemnité si elle est jugée injustifiée par le juge du contrat qui n’aura pas le pouvoir d’annuler la sanction.

Quelles sont les sanctions possibles ? Elles sont au nombre de 3 :

Le juge a rappelé que quelle que soit la sanction, les droits de la défense doivent être respectés. Le cocontractant doit être informé de la sanction que l’administration envisage prononcé dans un délai suffisant pour assurer sa défense. Le juge administratif contrôlera le bien fondé de la sanction. Même si elle est mal fondé, au mieux, ce sera les dommages et intérêts.

§3. Le principe de l’équilibre financier du contrat.

A.    Les droits du cocontractant.

Lorsque le contrat s’exécute de façon normale, le cocontractant dispose de deux séries de droits :

Les droits aux prérogatives de puissance publique que l’administration peut mettre à sa disposition pour faciliter l’exercice de ses obligations. Ainsi, le cocontractant a le droit de percevoir sur les usagers des taxes en contrepartie des services qu’il leur rend (autoroute). Les entrepreneurs de B.T.P. ont le droit d’occuper le terrain privé.

Dans certaines hypothèses, le cocontractant peut recevoir un monopole de droit, l’administration doit laisser dans certaines hypothèses les prérogatives de puissance publique qu’on lui a confié. Le cocontractant a droit au paiement du prix convenu. Le contrat fixe les bases de la rémunération qui constitue la contrepartie des obligations du particulier. Le prix peut être prévu de différente manière :

Il est fixé dans le contrat de façon définitive : contrat à prix ferme. Pour d’autres, ce sont des rémunérations modifiables en fonction des références prises au contrat. Enfin, la rémunération peut être affectée à des clauses de variation : prix révisable. Le prix n’est en principe du au cocontractant qu’une fois que les obligations de celui-ci sont entièrement remplies : principe de comptabilité publique.

Ceci permet à l’administration de vérifier que les fournitures commandées correspondent bien à celles données. Il y a des avances sur frais : de nombreux aménagements ont été fait avec une série de textes dans le code du marché public : avances ou acomptes versés. Ces dispositions échappent au pouvoir de modification unilatérale de l’administration.

B.    Le principe d’équilibre financier du contrat. 

On estime que la rémunération du contrat ne doit pas être fixée par le contrat mais modulé sur les charges réelles qui pèsent sur le cocontractant. Cette idée est à la base de la théorie des suggestions imprévues : si le cocontractant rencontre des difficultés extérieures à la volonté des parties, et imprévisibles, il doit en être indemnisé. On trouve à la base l’intérêt général. Si le cocontractant se heurte à des difficultés imprévues, l’intérêt général est compromis. Ce principe se dégage dans deux théories : la théorie du fait du prince et la théorie de l’imprévision.

@. La théorie du fait du prince.

L’administration utilise ses prérogatives à l’encontre du cocontractant. La puissance publique (prince) aggrave par son fait les conditions d’exécution du contrat. L’administration peut être tenue d’indemniser le cocontractant, indemnisation qui sera intégrale, c'est à dire égale au préjudice subit. Il faut remarquer que l’aggravation du contrat est le fait de l’administration mais aussi de la puissance publique mais également d’une autre personne publique.

Selon que la mesure prise émane de la personne publique cocontractante, la jurisprudence est nuancée selon que la mesure en cause est une mesure à caractère général ou à caractère individuel. Ces mesures peuvent rendre difficile une mesure d’exécution du contrat. Si le maire de la commune établit des interdictions de circulation, c’est une mesure d’ordre général qui peut indisposer le cocontractant.

La théorie du fait du prince joue toujours lorsque la personne publique contractante use de son pouvoir unilatéral du contrat. La jurisprudence qui assimile l’hypothèse où cette même personne publique prend une mesure qui aggrave les charges de son cocontractant, à une mesure individuelle prise non pas sur la base du contrat mais à un autre titre. Ainsi, on trouve l’arrêt du Conseil d'Etat du 02.02.1983 Union des transports publics urbain.

A l’inverse, la théorie ne joue jamais lorsque la mesure qui alourdit émane d’une autre personne publique que la personne publique contractante. C’est le cas pour un décret. L’aléa administratif est assimilé à un aléa économique, événement où pourra s’appliquer la théorie de l’imprévision.

Enfin, elle peut parfois jouer lorsque la personne publique contractante a une répercussion directe sur l’un des éléments essentiels du contrat. Ce pourrait être le cas pour un contrat passé par l’état d’une mesure telle que la création d'une taxe frappant de matière première un des éléments essentiels du contrat.

@. La théorie de l’imprévision.

C’est l’aléa économique qui est pris en considération. Au cours de l’exécution d'un contrat qui se poursuit sur une certaine durée, des bouleversements économiques viennent imposer au cocontractant une surcharge. Il peut toujours exécuter le contrat mais l’exécution qui reste possible devient désastreuse. La jurisprudence a élaboré cette théorie pour éviter la ruine. Cette théorie est élaborée dans l’arrêt du Conseil d'Etat du 24.03.1916, Cie Gaz de Bordeaux.

Les faits sont assez simples puisque du fait de la Première Guerre Mondiale, le prix du charbon avait subi une telle hausse que les concessionnaires du gaz ne pouvaient plus faire d’exploitation au prix du contrat car cela leur revenait trop cher. Le juge administratif a estimé que la ruine du cocontractant où de telles circonstances demeuraient sans effet, serait de nature à compromettre la nécessaire continuité du service fournit. Le juge a construit cette théorie qui partage l’aléa économique entre les deux contractants. La personne publique verse à son cocontractant une indemnité qui lui permet de poursuivre l’exploitation, donc elle partage l’aléa économique.

Quand y a-t-il imprévision ? Il y a trois conditions :

Les événements générateurs d’imprévision peuvent être des événements politiques, des phénomènes naturels, l’intervention de l’autorité publique qui n’est pas l’autorité contractante et qui intervient de manière générale telle une dévaluation monétaire ou une mesure de blocage des prix. Le cocontractant peut se prévaloir de la théorie de l’imprévision vis-à-vis de la personne publique avec qui il a contracter. La personne publique contractante ne peut pas elle se retourner contre la personne publique dont émane la commune. C’est le cas dans l’arrêt du Conseil d'Etat, 15.07.1949, Ville d’Elboeuf.

Quels sont les effets ? C’est l’idée selon laquelle un contrat ne peut plus régir une situation qui le dépasse, on entre dans une période extra contractuelle : on est mis en parenthèse pendant un certain temps. Les parties doivent essayer de réaliser entres elles un accord, c’est alors le juge qui fixera les règles qui vont s’appliquer dans une période extra contractuelle. Le contrat subsiste, les cocontractants sont tenus d’exécuter. S'il y a une interruption, il y a perte de tout droit à indemnité selon l’arrêt du Conseil d'Etat du 08.05.1911, Société Propétrole.

A l’égard de l’administration, l’application de la théorie ne fait que mettre en œuvre l’équilibre financier du contrat. Le contrat peut-il être adopté et de quelle manière ? Cette obligation se concrétise dans l’indemnité de l’imprévision versé de la personne publique à son cocontractant, elle n’est jamais égale à la totalité des pertes subies (charges extra contractuelles).

On retient un équilibre global. En moyenne, l’administration verse des indemnités d’imprévision qui correspondent à 90-95% de la charge extra contractuelle. Cette situation est conçue comme essentiellement temporaire : permettre au cocontractant d’exécuter le contrat. Si les conditions économiques se consolident, le déficit va prendre un caractère définitif :

Depuis, en raison de l’instabilité monétaire, ont été inclus des clauses qui assurent à l’adaptation des contrats pour les fluctuations économiques. Il y a certains renouvellements selon la décision du 12.03.1976, département des Hautes Pyrénées, où le Conseil d'Etat a accepté une indemnité d’imprévision après la fin d'un contrat. Ainsi, le lien entre la théorie de l’imprévision et le principe de continuité du service public n’exclut pas la mise en œuvre de la théorie pour des raisons d’équité.

§4. La fin du contrat administratif.

Il y a différentes manières ! Normalement, la fin se fait par l’exécution des obligations des parties : marchandises livrées, bâtiments construits, terme expiré. Le contrat peut également se terminer par la volonté commune des parties. Le contrat peut s’achever par l’effet de la force majeure. Il existe en revanche d'autres procédés tels que la résiliation prononcée soit par le juge soit par l’administration elle-même.

A.    La résiliation par l’administration.

Elle résilie unilatéralement en dehors même des hypothèses où le contrat lui reconnaît ce pouvoir. Cette résiliation peut s’opérer dans deux séries d’hypothèses : sanction qui a lieu en cas de faute grave du cocontractant. Cela est possible, sauf dans le cas des concessions.

La résiliation peut également intervenir alors que le cocontractant n’a commis aucune faute, l’administration résiliant le contrat dans l’intérêt général. La jurisprudence reconnaît que si l’intérêt général l’exige, l’administration peut toujours mettre fin au contrat conclu par décision individuelle ou même par voie de mesures générales : adapter l’action de l’administration.

On indemnise intégralement son cocontractant par la théorie du fait du prince (Conseil d’Etat,02.05.1958, Distillerie Magnac Laval). Dans le cas de la concession, on dit que l’administration rachète la concession (Conseil d’Etat,02.02.1987, Assemblée Société TV6). La résiliation du contrat est toujours possible et toute clause du contrat de nature à faire obstacle à l’exercice de ce pouvoir de l’administration est nulle. Il y a une nécessité de fonctionnement du service public (Conseil d’Etat,06.05.1985, Eurolat). Enfin, il faut signaler que l’administration puisse résilier si son cocontractant lui-même le lui demande : résiliation pure et simple, il n’y a aucune indemnité si l’administration n’a commis aucune faute.

B.    La résiliation par le juge.

Dans certaines hypothèses, c’est le juge qui peut résilier à la demande du particulier. Il saisit le juge en cas de faute de l’administration. On demande au juge de prononcer la résiliation. L’administration doit indemniser le cocontractant. Le particulier peut demander la résiliation lorsque les modifications sont trop importantes. Enfin, le particulier peut demander de résilier le contrat dans certaines hypothèses de force majeure.

C’est le cas pour les concessions de services publics, la déchéance ne pouvant être prononcée que par le juge. L'administration est autorisée à renoncer à son pouvoir de résiliation. Dans certains cas, le juge peut être saisit indifféremment par d’autres parties. C’est l’hypothèse de l’imprévision lorsque l’équilibre économique du contrat apparaît bouleversé.