L'INTERVENTION DU JUGE ETATIQUE EN MATIERE ARBITRALE

 

Le juge étatique est amené à intervenir à tous les stades de la phase arbitrale et intervient après le prononcé de la sentence. Tout d'abord l'intervention qui se produit, à l'occasion de la procédure arbitrale.

 

Section 1: L'intervention à l'occasion de la procédure arbitrale.

 

Cette intervention a lieu d'abord pour la composition du tribunal arbitral. En effet, en cas de divergence des parties sur la désignation des arbitres, convient de saisir sur requête le président du TGI dans le ressort duquel se déroule l'arbitrage. En principe, chaque partie désigne un arbitre et les arbitres désignés choississent le président du tribunal arbitral.

En cas de difficultés dans cette désignation et pour ne pas bloquer la procédure arbitrale, on va demander au juge étatique de prendre une décision de nomination. Sur 3 arbitres, on a généralement un technicien de l'objet du litige, un juriste, et un gestionnaire / expert comptable. On va fournir au président du TGI la liste des arbitres pour qu'il effectue un choix.

 

Le juge étatique est également compétent pour la récusation des arbitres. On peut la demander lorsque l'on a l'impression qu'il y a eu une fraude dans la désignation. C'est le cas d'un ancien directeur de Promodès désigné comme arbitre. En effet, on a peur d'une justice partiale.

Lorsqu'il y a une action ou récusation, ça rend public l'arbitrage, car on doit procéder par une voie d'assignation et assigner la personne qui a désigné l'arbitre, mais aussi l'arbitre qui a été désigné. Le juge étatique qui récuse l'arbitre va désigner d'autorité un nouvel arbitre. Le président du TGI peut intervenir lors d'un décès ou d'un empêchement grave d'assurer la fonction pour l'arbitre. C'est un moyen de s'opposer à la reconnaissance et à l'exécution de la sentence.

 

Le juge étatique est aussi compétent pour les mesures conservatoires et provisoire, tout simplement parce que c'est le seul à pouvoir prendre des mesures coercitives car les arbitres n'ont pas l'impérium. Il arrive que les parties tentent d'obtenir des mesures conservatoires devant l'arbitre. Pour l'instant, ceux-ci se sont toujours déclarer incompétent mais il faut savoir que le règlement CCI dans sa version 98 envisage le référé arbitral fondé sur l'urgence qui est aussi l'un des fondements des mesures conservatoires et provisoires. Il y a ainsi une compétence exclusive du juge étatique.

On remarque que les textes relatifs à l'arbitrage disent que cette compétence est attribuée au Président du TGI. Lorsque l'on a réformé les procédures civiles de réglementation, on a remplacé le président du TGI par le JEX, mais on a oublié de le faire dans les textes sur l'arbitrage. Parfois, les parties saisissaient le JEX tandis que d'autres saississaient le Pdt du TGI. En fait, ce n'est pas compliqué lorsqu'on est dans une petite juridiction car c'est la même personne (en fait, lorsque c'est une juridiction plus importante).

 

Lorsque l'on saississait le président du TGI, on le saisissait par rapport à la voie d'exécution qu'il allait traiter lui même ou faire traiter par son délégué. Ces mesures doivent être prisent à chaque fois par le JEX.

 

Pb: ce n'est pas toujours évident de définir les mesures conservatoires et provisoires d'autant plus que les qualifications sont employés de façon indifférente. En fait, on peut dire selon Fouchart que ce sont "des mesures provisoires concernant la nature de la décision, une décision provisoire étant celle qui ne lie pas le juge ou l'arbitre appelé à statuer au fond. Les mesures conservatoires concernent l'objet de la décision car elle tend à préserver une situation des droits ou des preuves.

 

Remarque, une décision conservatoire est quand même provisoire même si dans certains cas, elle a épuisé ses effets au moments de la décision au fond. A l'inverse, une décision provisoire n'est pas nécessairement conservatoire.

 

Dès lors, on constate une 3e hypothèse d'intervention du juge étatique: le référé provision. L'objet est de satisfaire le titulaire d'une créance non sérieusement contestable au moyen d'une procéudre d'urgence fondée sur l'art. 809 al 2 et 873 al 2 du NCPCiv. La Convention de Genève de 1961 laisse également au juge étatique la compétence pour statuer sur une demande de mesures provisoires ou conservatoire à titre gracieux ou contentieux (art. 6§4).

 

Section 2: Intervention du juge étatique après la sentence.

 

Après la sentence, le juge étatique peut intervenir en annulation de la sentence international ou en reconnaissance et exécution des sentences. En droit international, la sentence ne peut pas faire l'objet d'appel, d'opposition et de pourvoi. Reste alors possible la voie de la tierce opposition et le recours en annulation. On va devoir opposer selon que l'on est en présence d'une sentence arbitrale française ou étrangère.

 

§1. La reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales.

 

Art. 1498 NCPCiv dispose que les sentences arbitrales sont reconnues en France si leur existence est établies par celui qui s'en prévaut et si cette reconnaissance n'est pas manifestement différent à l'ordre public international français. Selon l'alinéa 2, c'est la même règle qui vaut en matière d'exécution.

 

Pour obtenir cette reconnaissance, il faut saisir sur requête le président du TGI dans le ressort duquel l'arbitrage s'est déroulé. Semble donc que cette reconnaissance ne soit possible que si la sentence est rendue en France. On s'est demandé si l'on pouvait lorsque l'on était français invoqué les art. 14/15 CCiv pour fonder la compétence sur la reconnaissance d'une sentence rendue à l'étranger. Pour l'heure, il n'y a pas de décision sur ce point, mais si aboutissement il y a, les privilèges de juridictions ne donnant qu'une compétence générale, conviendrait systématiquement de saisir le juge parisien.

 

Le juge est saisit par requête => l' EXEQUATUR est reconnu ou refusé sans qu'il n'y ait de débat contradictoire entre les partis. Cela évite un débat sur le fonds et cela confirme l'intention du législateur de laisser à la Cour d'Appel (juge de l'annulation), tout ce qui touche au fond du litige. Le demandeur doit fournir selon l'art. 1499, l'original ou une copie authentique de la sentence ou la convention d'arbitrage voire en cas de besoin, la traduction certifiée par un traducteur inscrit près la Cour d'Appel de ces différentes pièces.

 

L'ordonnance qui accepte l'exéquatur et va apposer la formule exécutoire au bas de la sentence n'a pas à être motivée. Cette ordonnance doit être signifiée pour pouvoir prendre effet. Après l'expiration du délai de recours, elle sera définitive et on pourra procéder à l'exécution de la sentence. Si l'exéquatur est refusée, l'ordonnance doit être motivée par référence à l'ordre public et il sera possible d'interjeter appel puis de former un pourvoi car il s'agit d'une décision judiciaire interne.

 

Le Président du TGI se contente d'accorder ou de refuser, mais ne peut rien ajouter à la sentence et ne peut pas non plus accorder au demandeur les frais irrépétibles de l'art. 700 du NCPCiv. Il ne peut non plus ordonner l'exécution provisoire de la sentence à moins que les arbitres ne l'ait fait eux mêmes dans la sentence. Un refus partiel était tout à fait possible car une seule des dispositions de la sentence peut être opposer à l'ordre public sans en affecter les autres.

 

On ne peut faire appel qu'en cas de refus de reconnaissance ou d'exécution de la sentence. L'art. 1502 précise les 5 cas d'ouverture:

1. Si l'arbitre a statué sans convention d'arbitrage ou sur convention nulle ou expiré.

2. En cas de composition irrégulière du tribunal arbitral.

3. Si l'arbitre n'a pas respecté son acte de mission càd statuer infra ou ultra petita.

4. Lorsque le principe du contradictoire n'est pas respecté.

5. S'il y a une opposition à l'ordre public international.

 

Le président du TGI ne peut se fonder que sur l'ordre public. En revanche, en appel, l'ordre public est l'un des 5 cas d'ouverture du recours. En les précisant, on se rencontre que s'il y a fraude à la loi, l'appel n'est pas possible. Dès que la Cour d'Appel a statué, le pourvoi est possible, mais la Cour de Cassation est tenue par les 5 cas d'ouverture de l'art. 1502 NCPCiv. Rem, même en droit interne, il y a exéquatur (reconnu pour pouvoir exécuter). Remarque, s'il y a une sentence rendue à l'étranger, on est en présence de l'exéquatur au sens du droit international privé càd la reconnaissance et l'exécution d'une décision judiciaire étrangère.

 

Soit l'hypothèse dans laquelle l'arbitrage a lieu en Suisse. On demande au juge Suisse de bien vouloir imposer la formule exécutoire mais par la suite, il s'agit de faire exécuter la sentence en France, mais en France, on ne va pas pouvoir exécuter une décision rendue à l'étranger et il faut donc que cette décision intègre l'ordre judiciaire français. Cela se produira par la saisine du juge français de l'exéquatur ie le TGI siègeant à juge unique sur assignation. L'exéquatur ne va pas se régler entre la France et la Suisse, car même s'il y a la convention de L, elle exclut l'arbitrage, donc on applique le droit commun.

 

Il faut regarder si le Français n'est pas en cause, car la jp a évolué sur ce point avec l'arrêt Simitch du 06.02.1995. Les conditions sont fixées pour exéquatur par l'arrêt Munza de 1964. Le juge français de l'exéquatur doit vérifier que la juridiction qui s'est prononcé est compétente et que la loi a appliqué est la loi applicable!

 

=> Lorsqu'il y a un français en cause, les privilèges de juridiction empêche l'exéquatur car on estime que le juge étranger n'avait pas à statuer.

=> Lorsqu'aucun français n'est en cause, il suffit d'un lieu caractérisé et non frauduleux entre la situation litigieuse et la juridiction qui a statuée. S'agissant de l'exéquatur d'une décision ayant ordonné la reconnaissance à l'étranger d'une sentence arbitrale, les conditions sont plus sévère que pour une décision prise en France (liée au droit international privé et non à l'arbitrage).

 

§2. Le recours en annulation.

 

Il n'existe pas d'appel possible de la sentence en matière de DCI. L'appel est réservé à l'arbitrage interne. C'est pourquoi il faut faire attention lors de la rédaction d'une clause compromissoire car une clause compromissoire permettant l'appel ne pourra être valable. Toutefois, les arbitres considéraient qu'une clause décidant que tout différend sera tranché en premier ressort par voie d'assignation, serait une clause pathologique curable.

 

La juridiction compétente pour statuer en annulation de la sentence rendue sous l'égide de la CCI est la Cd'A Paris chaque fois que l'arbitrage s'est déroulé en France. Les autres cours d'arbitrage locale font référence à la Cour d'Appel de leur ressort. Lorsque la Cour d'Appel refuse d'annuler la sentence, celle-ci est déclarée reconnu et exécutoire en France. La décision de la Cour d'Appel est susceptible d'un pourvoi devant la Cour de Cassation.

 

Quels sont les cas d'ouverture du recours en annulation?

 

Selon l'art. 1504 NCPCiv: "la sentence rendue en France en matière d'arbitragee international peut faire l'objet d'un recours en annulation dans le cas de l'art. 1502 NCPCiv". Les cas de recours en annulation sont les cas dans lesquels l'appel contre l'ordonnance qui refuse la reconnaissance sont ouverts. Cest le cas lorsque la Cour d'Appel refus d'annuler.

 

Ainsi, on a:

1. Si l'arbitre a statué sans convention d'arbitrage ou sur convention nulle ou expiré.

2. En cas de composition irrégulière du tribunal arbitral.

3. Si l'arbitre n'a pas respecté son acte de mission càd statuer infra ou ultra petita.

4. Lorsque le principe du contradictoire n'est pas respecté.

5. S'il y a une opposition à l'ordre public international.

 

Les cas d'annulation de sentence par la Cour d'Appel de Paris sont rares. Il a fallu plus de 20 ans d'arbitrage international pour que la Cour d'Appel de Paris annule une sentence rendue sous l'égide de la CCI. La première annulation est l'arrêt sur les pyramides d'Egypte. Depuis 1984, on a constaté 8 annulation de sentences arbitrales (une tous les 2 ans). C'est exceptionnel parce que c'est bien un cas d'ouverture, mais les parties ont décidé d'exécuter spontanément la sentence. De plus le fait que l'arbitre est très proche des règles de l'arbitrage entraîne un respect strict des conditions.

 

Quels sont-ils ces 8:

* 3 cas sur l'absence de clause compromissoire valable. A chaque fois, c'est dans l'hypothèse d'une personne qui a signé la clause sans avoir reçu le pouvoir de le faire.

* 2 concernant l'acte de mission. Les arbitres ayant statué ultra petita.

* 3 concernant l'ordre public international rendue toutes les mêmes jours à propos d'une faillite et la CA Paris puis la CdC ont estimé qu'il était impossible qu'un tribunal arbitral siégeant en France prononce la faillite d'une société situé en France ou à l'étranger. Le droit des procédures collectives est institutionnalisé car il protège notamment le crédit et c'est la raison pour laquelle seul un juge étatique peut ouvrir une procédure collective.

 

Toutes les décisions rendues par la Cour d'Appel prononcent l'annulation de la sentence ont fait l'objet d'un pourvoi en cassation et la cour a rejeté tous les pourvois. Lorsqu'une sentence a fait l'objet d'une annulation, il faut également solliciter l'exéquatur de la décision d'annulation sinon, une sentence annulé en France pourrait très bien être exécuté à l'étranger et inversement. C'est ce qui s'est produit en 1985 dans l'affaire NORSOLOR: une sentence international avait été rendue en Suisse. L'une des parties était française. La société française engage un recours en annulation devant le juge suisse pendant que l'autre partie demande l'exécution de la sentence en France.

 

Le Président du TGI refuse la reconnaissance et l'exécution. Il y a appel contre cette ordonnance de refus. La Cour d'Appel, parce que le juge Suisse ne s'est toujours pas prononcé, autorise l'exécution de la sentence. Peu de temps après, le juge suisse annule la sentence. La société française se pourvoit en cassation et demande parallèlement l'exéquatur de la décision d'annulation suisse (sinon on peut toujours exécuter).

 

La Cour de Cassation rend un arrêt surprenant et décide qu'une sentence ayant fait l'objet d'une annulation ne peut plus bénéficier de la procédure simplifiée de la convention de NY sur la reconnaissance et l'exécution des sentences qui doit être appréciée selon le droit commun ie 1502 et suivant du NCPCiv. La sentence annulée en Suisse peut très bien être exécutée en France.