LE CONTRAT DE TRAVAIL

 

                En droit du travail, on distingue classiquement le droit individuel et le droit collectif (contrat de travail, représentation du personnel et grève). C'est la classification adoptée en droit interne.

 

Section 1: le contrat individuel de travail.

 

§1. La qualification du contrat de travail.

 

Elle s'opère lege fori. On relève l'existence d'un contrat de travail par référence à la définition donnée en droit interne. Pour l'instant, en droit interne, on est resté sur la définition classique ie celle donnée avant l'intervention de la loi Madelin ie que le contrat de travail est un contrat liant un employeur et un salarié, le salarié étant placé dans un état de subordination moyennant rémunération.

 

En droit interne, la notion de lien de subordination s'est un peu effacée pour faire place à celle de "service organisé". Elle permet de distinguer le contrat de travail du contrat d'agence. Il y a une répercution sur la compétence. Le contrat d'agence est soumis aux tribunaux de commerce et le contrat de travail aux conseils des prud'hommes en droit interne.

 

La qualification intervient aussi pour la détermination de l'employeur: celui qui donne des ordres et qui rémunère. C'est une détermination qui est simple en droit interne. Elle peut être compliquée en droit internationale par cette situation de fait car celui qui donne des ordres n'est pas forcément celui qui paye. C'est l'ancien critère de subordination qui importe en jp. Cf. Affaire HAVAS concernant un journaliste travaillant à Paris pour Havas Paris mais qui était rémunéré par Havas NY. La Cdc estime qu'est employeur Havas Paris, car c'est Havas Paris qui lui donne les ordres de missions (le lieu d'exécution du contrat de travail est indifférent).

 

Pb, pour déterminer l'employeur pour un salarié détaché à l'étranger, ou pour un salarié expatrié. Le salarié détaché l'est au moyen d'un contrat qui assure une coupure entre l'employeur d'origine et l'employeur d'affectation. De plus, le détachement est une mise à disposition par la société mère d'un de ses salariés auprès d'une de ses filiales. L'employeur devient la filiale du fait de ce détachement (plus d'autonomie juridique de la filiale # à la société mère). Le salarié expatrié reste en contact avec l'employeur qui continue de le payer et de lui donner des ordres. Il en fait que changer le lieu d'exécution de son contrat.

 

§2. La détermination du juge compétent.

 

Il peut exister des dispositions spécifiques au contrat de travail => qualification importante. On va distinguer le droit conventionnel et le droit commun.

 

En droit commun => Art. 42 et suivants du NCPCIV: en matière de contrat de travail, on vérifie d'abord s'il existe une clause attributive de compétence. L'interdiction de choisir son juge en droit interne du travail n'existe pas en droit international. On vérifie que cette clause attributive par référence à l'arrêt Cie des Signaux, 1985, pour s'assurer que le juge choisi ne porte pas atteinte à une compétence exclusive du juge français. On peut ainsi recourir à l'arbitrage. Si aucune des clauses attributives n'existe, on transpose les art. 42 et 46 al 1er.

                => sur l'art. 42: on aura la compétence du tribunal du défendeur s'il est en France => juge français compétent et on vérifiera les règles fixées par le code du Travail.

                => ou on se fonde sur l'art. 46 al 1er (+ rapide): prise en considération du lieu d'exécution du contrat (exécution de prestations). Si l'une des parties est de nationalité française, il est toujours possible d'invoquer les privilèges de juridiction.

 

En droit conventionnel: existent des dispositions particulières dans les conventions de Bruxelles et de Lugano. La compétence de ppe: celle du tribunal du domicile du défendeur. Toute l'évolution s'est faite sur l'art. 5-1 et l'art. 17. Quand on se réfère à la convention de Bruxelles en matière de contrat de travail, il convient de suivre la jp de la CJCE qui précise l'art. 5-1 alors que sur Lugano, on reprend ces solutions pour les intégrer en prolongement de l'art. 5-1.

=> Si une clause attributive de compétence existe, la convention de Lugano dans son art. 17-5e précise qu'en matière de contrat individuel de travail, les conventions attributives de juridictions ne produisent leurs effets que si elles sont postérieures à la naissance du différend. Au sens de la convention, on veut éviter ces clauses pour appliquer l'art. 5-1e ou Art. 2.

 

§3. La loi applicable.

 

1. La forme du contrat.

=> on doit se réferer aux solutions classiques en matière de forme des actes juridiques. Le ppe "locus regit actum" est facultatif. (Chaplin, Pierruci, Zagha). Le choix est soit la loi du lieu de la clause du contrat, soit la loi applicable au fond. Cette règle valable en droit commun est reprise en droit conventionnel dans la convention de Rome. C'est toujours dans l'intérêt du salarié.

 

Pb: le contrat doit-il être écrit? Aucun système juridique l'impose pour tous les contrats de travail (cf. en Allemagne). En France, l'écrit est obligatoire pour tout ce qui n'est pas CDI. En droit interne, ce problème de l'écrit n'est pas fondamental (toujours dans l'intérêt du commerce international).

 

=> si le salarié est amener à changé de lieu d'exécution de son contrat: cela n'a aucune incidence sur la forme du contrat et sur sa validité car on se référera toujours au contrat d'origine, même s'il ya eu un avenant (solution du droit commun). Cette solution est reprise par la Convention de Rome. Elle pose le principe dans ses dispositions générales: s'il y a une modification en cours d'exécution, cela n'affecte pas la validité du contrat.

 

2. Le fond.

 

Ppe: de la loi d'autonomie ie la possibilité pour les parties de choisir la loi applicable (AMERICAN TRADING 1910 qui s'applique au contrat de travail).

 

                A. En droit commun

Cette loi peut être choisie dès la conclusion du contrat ou ultérieurmeent par un avenant ou même simple lettre. Pour la Cour de Cassation, le fait de viser une convention collective dans un contrat de travail valait choix de la loi applicable. La convention collective s'intègre dans la hierarchie des normes d'un état.

 

Remarque, en droit conventionnel: Rome prévoit la loi d'autonomie et la possibilité de la modification en cours d'exécution du contrat. On peut envisager plusieurs lois applicables: sachant que si une seule loi est choisie, elle s'applique tant à la procédure qu'au fond pour ce qui concerne le licenciement.

 

En absence de choix: il appartient au juge de déterminer la loi applicable. Cf Mercator Press: en matière de contrat de travail. La Cdc est à la recherche de la volonté implicite des parties qui s'opère par référence aux éléments intrinsèques du contrat. Cet arrêt a été confirmé par la Cdc le 28.10.1997 dans l'arrêt PIRIOU: aucune loi n'avait été prévue dans le contrat liant un salarié et un employeur français (situation en droit interne au départ). Le salarié est amené à travailler à la restauration d'un resto au Pakistan. La Cdc constate que le contrat avait pris effet en France, avant que le salarié n'aille au Pakistan. Les deux parties sont françaises. La rémunération est en francs français. Les éléments du contrat conduisent à la désignation de la loi française car la loi pakistanaise n'aurait résulté que d'élément peu importants.

 

Parfois la situation diffère: cf. Affaires des Pilotes de Lignes: Arrêts ROYAL AIR MAROC et AIR AFRIQUE: en 1986, la Cour de cassation décide de l'application de la loi du lieu d'exécution, éventuellement corrigée par les dispositions plus favorables de la loi d'autonomie. Si les parties on choisies une loi, les juges prennent acte du choix mais doivent d'abord appliquer la loi du lieu d'exécution. Mais cf. Piriou: aucune loi choisie => on détermine la loi applicable, mais on ne prend pas celle du lieu d'exécution. Est-ce dans la lignée ou une autre solution?

 

Ex: un contrat de travail entre un salarié français et un employeur allemand. Aucune loi n'est choisie. Le contrat est exécuté au Sénégal => Rémunération en Deutsch Mark. On prend la loi sénégalaise éventuellement corrigée par la loi d'autonomie. Mais n'existe pas. En l'absence de choix, on regarde les éléments du contrat. On détermine la volonté des parties => loi allemande. Dès lors la loi sénégalaise s'applique, éventuellement corrigée par la loi Allemande.

 

Pb: quid des dispositions plus favorables? Au salarié, à l'établissmeent ou à la relation contractuelle? On pourrait croire que ce sont celles pour le salarié. Mais dans certaines affaires (le licenciement est régit par la loi anglaise). La cour de cassation n'a pas appliqué la loi française, mais la loi Angalise qui prévoyait deux mois d'indemnités, la loi français 6, mais la Cour de Cassation a estimé que la loi française n'était pas plus favorable.

 

B. En droit conventionnel.

La convention de Rome prévoit une présomption en l'absence de choix. Cette présomption est simple. Elle s'opère en faveur du lieu d'exécution, mais ici, le raisonnement est l'inverse de celui français. Avec Rome, la loi d'autonomie doit être éventuellement corrigée au moyen des dispositions plus favorables de la loi du lieu d'exécution.

 

Remarque: toutes ces solutions peuvent être modifées par le jeu de l'ordre public qui va contribuer à évincer la loi d'autonomie si celle ci est choquante. En droti conventionnel comme sur la Convention de Rome, on peut être confronté aux lois de police. Cf. L'art. L122-14-8 CT qui concerne la mise à disposition de salarié. Si le salarié qui a été détaché auprès d'une filiale étrangère est licencié par cette filiale, la société mère française est obligée de la réintégrer quitte à la relicencier le lendemain. Par application de la convention de Rome, le juge Belge applique l'art. L122-14-8 car c'est une loi de police. Cela est curieux car on avait détaché le salarié en France.

 

Section 2: le droit collectif du travail.

 

§1. La représentation du personnel.

 

Cf. Arrêt du CE, 1973, Cie internationale des Wagons Lits: C'est une société de droit Belge. Les employés demandent la création d'un comité d'entreprise. CE qui à l'époque n'est pas connu en droit belge. Cette demande est possible en France car il y a plus de 50 salariés. Il ne faut pas que ce soit des personnes itinérantes. MAis comme il y a 50 salariés toute la journée même si ce n'est pas toujours les mêmes, cette règle vaut pour les salariés de toute entreprise étrangère travaillant pour cette entreprise sur le territoire français. Cette solution jurisprudentielle reprise par les lois Aurioux est intégrés à L411-1du code du travail est considéré comme une loi de police.

 

Pb: un juge étranger appliquerait-il cette règle au titre des lois de Police?

 

§2. La grève.

 

Définition: cessation concertée d'une activité. Elle repose sur des revendications professionnelles. En droit français, elle est un droit à valeur constitutionnelle  (cf. Préambule de la constitution). Néanmoins, on doit s'interroger:

 

1) sur la licéïté de la grève?

 

En droit interne: la licéïté de la grève est appréciée selon la loi du lieu de la grêve et non pas selon la loi régissant le contrat de travail. C'est très important car les employeurs n'admettent pas forcément le même type de grève. Ces principes ont été posés par les arrêts MONFORT et MONTALER: un salarié français travaillant aux îles vierges et il participe à une grève. Les salariés de l'entreprise revendiquent une augmentation de salaire. Parce qu'ils ont participé à cette grève, ils sont licenciés par l'employeur français qui invoque leur participation à une grève illicite. En effet, en droit américain, une grève est illicite car politique lorsque les salariés revandiques une augmentation de salaire. Le salarié conteste le licenciement car son contrat était régi par la loi française et participe à une grève pour une revandication professionnelle.

 

Pour la Cour de Cassation, la licéïté de la grève s'apprécie selon la loi de la grève. La loi américaine déclare la grève illicite => le licenciement peut être à juste titre considéré par l'employeur comme reposant sur un motif réel et sérieux. Toutefois, en participant à une grève concernant les salries, le salarié gréviste français a pu légitimement croire qu'il participait à une grève licite. La Cdc applique donc la théorie de l'apparence pour déclarer le licenciement abusif.

 

Aujourd'hui, la loi applicable à la grève est celle du lieu de la grève éventuellement tempérée par la théorie de l'apparence.

 

                2) En cas de grève de solidarité.

 

                Elle est licite (en France et dans UE) car en repose pas sur la protection d'intérêts professionnels personnels aux grévistes. Il n'y a pas de jurisprudence en France actuellement. On entend l'affaire Renault Villeworde. En DIP: on trouve une affaire anglaise de 1966: OLYMPIQUE AIRWAYS: le personnel navigant grec se met en grève en Grèce. Pour obtenir gain de cause, on demande aux personnels se mettre en grève. Celui de British Air Ways se met en grève par solidarité avec le personnel grec. Pb: en Grève, la grève est licite mais en GB, on sanctionne la grève de solidarité. Le juge anglais constate que le personel de British Airways ne profite pas de cette règle pour revandiquer personnellement. Le juge anglais en déduit qu'il peut autoriser British Airways à sanctionner son personnel navigant qu'il soit grec ou non.

 

                Dans l'affaire Renault Villworde, on se demandait si c'était une grève de solidarité? Le juge compétent serait le juge français. Ont-ils fait grève ou ont ils manifesté pendant leur temps de travail? Loi du lieu de la grève, où ont-ils manifesté? La manifestation a eu lieu en Belgique => loi belge. Elle ne connaît pas la grève de solidarité, mais elle serait contraire à l'ordre public français à condition qu'il y ait grève. Or elle a eu lieu un dimanche. Il ne peut pas y avoir de sanction => pas de grève. Maintenant est-ce qu'un salarié français de chez Renault va manifester en Belgique: n'y a t-il pas aussi une part d'intérêt professionnel personnel?