l'ENDETTEMENT DES ENTREPRISES

 

L’entreprise s’endette pour deux raisons :

1/ Pour couvrir un délai qui sépare le moment de l’engagement des dépenses courantes de production du moment de vente. Entre le cycle de production et réalisation sur le marché de production, il peut s’écouler un temps plus ou moins long. L’entreprise a donc besoin de crédit de fonctionnement, elle manque de fonds de roulement.

2/ Pour anticiper sur des recettes futures attendues de l’installation de nouveaux moyens de production. L’entreprise a alors besoin de crédits d’équipement.

 

Mais les entreprises ont toujours recours à des degrés divers à l’autofinancement, au financement sur épargne qu’elles ont dégagé après paiement des dividendes aux actionnaires. L’autofinancement n’est jamais total et les entreprises ont toujours recours aux crédits d’extérieur.

Si comme aux Etats-Unis l’autofinancement est très développé, les entreprises trouvent le complément de financement sur les marchés financiers qui eux-mêmes sont développés et on parle alors d’une économie de marché financier. 

Au contraire, dans les économies où l'autofinancement est au moins important (comme en France), le marché financier est insuffisant et moins développé et le financement complémentaire est trouvé auprès des banques, c’est alors une économie d’endettement.

Mais dans un cas comme dans l’autre, les entreprises ne peuvent pas être indifférentes à la charge de l’endettement et à la rentabilité des opérations et ici, deux questions apparaissent déterminantes. L’efficacité marginale du capital et un effet de levier.

 

§1. L'efficacité marginale du capital et la demande de crédit des entreprises.

La comparaison du taux d’intérêt et du rendement attendu de l’investissement permet à l’entreprise de décider d’investir ou non. Du taux d’intérêt dépend la charge du crédit. Du rendement attendu dépend son caractère profitable ou non.

Ce qui intéresse l’entreprise ce n’est pas tellement la productivité marginale du capital, c'est à dire la production supplémentaire que son usage permet d’obtenir, c’est plutôt l’efficacité marginale du capital comme l’appelle Keynes.

L’efficacité marginale du capital est définie comme une valeur actualisée des rendements du capital. Keynes utilise une évaluation des rendements anticipés du capital. Ces anticipations traduisent la représentation que se font les entreprises du marché de leur production dans l’avenir.

Ce calcul repose sur l’utilisation d'un taux d’actualisation. Le taux d’actualisation est celui qui permet de calculer la valeur actuelle d'un montant futur. Par exemple, combien 11.000€ que vous recevrez dans un an valent-ils aujourd’hui ? Autrement dit combien faut-il placer aujourd’hui pour recevoir 11.000€ dans un an ?

S’il faut placer 10.000€ aujourd’hui, la valeur actuelle de 11.000€ dans un an est de 10.000€. On a 10.000 = 11.000/(1+i). Donc 11.000 = 10.000 (1+i).

Soit C0 le cas présent, C1 le cas futur. C0=C1/(1+i). Donc C0(1+i)=C1. D’où C0 + C0i = C1. En l’espèce, 10.000+ 10.000i = 11.000 d’où i= 10%

En généralisant, C0= Cn/(1+i)n

L’évaluation anticipée du rendement du capital est confrontée du taux d’intérêt courant. Si le taux d’intérêt dépasse la rentabilité attendue du capital, l’entreprise n’investit pas.

C’est une analyse qui peut s’appliquer à la situation actuelle qui est caractérisée par la conjonction d'un faible niveau d’activité économique et donc d’anticipation pessimiste et de taux d’intérêt élevés. Comme les opposants à la croissance du chiffre d’affaire sont rares et le coût du crédit élevé, les entreprises investissent peu.

 

§2. L’effet de levier.

Il s’applique à la rentabilité des capitaux propres de l’entreprise. Le bilan d’une entreprise se trouve ainsi :

Actif Passif
Actifs réels Capitaux propres
Actifs financiers Ressources empruntées
Actifs monétaires

L’effet de levier s’intéresse à la rentabilité des capitaux propres parce que les capitaux empruntés contribuent au profit, si l’entreprise emprunte sur le marché, la rentabilité des capitaux dépasse le taux d’intérêt sur le marché.

L’intérêt des entreprises est donc de s’endetter parce que plus elle s’endette à long terme, plus la rentabilité des capitaux propres est élevée.

Le poids de l’endettement de l’entreprise correspond à sa charge d’endettement mesurée ainsi : total du bilan / capitaux propres.

Le levier correspond au rapport entre les dettes totales de l’entreprise / les capitaux propres.

On part de la capacité d’autofinancement de l’entreprise c'est à dire un gros profit après impôts et avant distribution de dividendes correspondant à une mesure de sa capacité d’autofinancement.

Pour mesurer le rendement des capitaux engagés dans l’entreprise, on fait le rapport de la capacité d’autofinancement / le total du bilan. Ce rendement des capitaux engagés nous dit à quel taux les capitaux engagés sont rémunérés.

Le rendement des capitaux propres

        =autofinancement = autofinancement * total du bilan
          capitaux propres    total du bilan     capitaux propres

Le rendement des capitaux propres correspond au rendement des capitaux engagés multiplié par la charge d’endettement.

 

Mesurer la rentabilité différentielle des capitaux empruntés montre que les capitaux empruntés n’ont pas la même rentabilité que les capitaux propres, ils ont un coût.

La rentabilité différentielle        = capitaux empruntés - coût
                                               = Excédent B.E.  - frais financier.
                                                  total du bilan        dette totale

Plus la rentabilité différentielle des capitaux est forte, plus l’effet de levier de l’endettement sur la rentabilité des capitaux propres sera important. Et cet effet de levier de l’endettement sur la rentabilité des capitaux, on le mesure par la rentabilité différentielle des capitaux empruntés.

E.B.E.-frais financiers = Exédent.B.E. + [ EBE - frais financiers ] (=[dette totale])
         capitaux propres total du bilan(TB)   TB       dette totale         capitaux propres

L’effet de levier correspond à :
  
         [ Exédent brut d’exploitation - frais financiers ] (=[dette totale])
                 total du bilan                      dette totale         capitaux propres

Avec ici, la rentabilité          le levier     différentielle des capitaux empruntés

L’effet de levier a trouvé une justification théorique dans le théorème de Modigliani et Miller qui peut se résumer à la formule : “ la valeur d’une entreprise est indépendante de sa structure financière. Elle dépend des liquidités disponibles qu’elle dégage et d'un taux d’actualisation qui dépend du risque propre qui dépend de l’activité de la branche et qui ne dépend pas de la structure de financement de l’entreprise ”.