§1. Le formalisme s'impose aux parties et aux magistrats.

   A.    Le procès supplante la justice privée.

1.     L'évolution de la vengeance privée.

Elle dépend de l'organisation sociale et la présence de grandes familles. Vers les 1200 avant J.C. Rome n'existe pas, mais l'emplacement formé par une colline qui entoure le fleuve appelé le Tibre, voit l'emplacement de tribus pour faciliter les échanges. Ces tribus vivent d'agriculture et sont obligées pour se protéger de former des collectivités très fortes. Il n'y a pas d'individualisme; la Gens (tes) représente une famille.

Sur les collines, il existe une organisation en Gentes, la gens représente un regroupement de personnes qui se réclament d'un même ancêtre, la famille porte le nom gentilice de cet ancêtre, tous les membres de la famille porte le même nom, on les reconnaît par le prénom, mais surtout par le surnom.

Tous ces membres ont besoins d'un chef: le pater familias, qui juridiquement aura des prérogatives particulières: il est seul à être titulaire de droit et pourra faire des actes juridiques nécessaires à aller en justice pour défendre les droits. Le père de famille, et en même temps le maître de l'existence des membres de la famille, il a le droit de vie et de mort. Il doit faire respecter l'ordre dans la famille et il existe une justice interfamiliale qui permet de régler les problèmes familiaux.

Parfois, il y a conflit entre familles, il n'y a pas de droit familial, car les règle sont différentes. On élabore des codes de conduites qui ont un aspect de droit pénal qui précède toujours le droit civil. Pour éviter les conflits extérieurs, les Gentes vont décider de s'unir, de former une fédération pour laquelle il faudra trouver un gouvernement: la Royauté.

Les familles unies vont chercher un Roi, ils vont faire appel aux dieux, car il a les fonctions religieuses et politique or comme le droit est confondu, le roi aura la fonction judiciaire dans la société romaine. Le Roi est élu à la mort du roi précédent. Il y a une création de procès qui sont à l'origine une atténuation de la vengeance privée et une façon de faire respecter un ordre public en train de s'instaurer.

2.     La royauté coïncide avec le début de l’organisation du procès. La procédure sera longtemps qualifiée de jus actionum.

Procéder veut dire obéir aux règles qui fixent une façon d'agir; il s'agit de faire reconnaître des droits préexistants. A Rome, il n'y a pas de droit, il s'agit de régler des cas d'espèces c'est à dire des conflits en donnant une solution particulière à ces conflits et la solution du cas d'espèces dépend d'un avis de la divinité implorée au début du procès.

Le premier tribunal est formé par le Roi et par les prêtres de Rome: les pontifes. Le Roi, entouré des pontifes va examiner le cas présenté, ils vont interroger le Dieu et interpréter les signes. Les pontifes ont le pouvoir d'interprétation; ils ont seul le pouvoir de rendre la sentence et de clore le procès. On crée un calendrier judiciaire: il y a des jours fastes pour interroger les Dieux or la connaissance appartient aux pontifes. Ce calendrier judiciaire est un secret des dieux, on sait simplement qu'il y a 40 jours par an pour interroger les dieux. Les pontifes sont un intermédiaire entre les dieux et les hommes et gardent ce pouvoir pendant longtemps.

Il y a une évolution au 7e siècle avant J.C. Lorsque l'Italie centrale est dominée par un peuple nouveau, les Etrusques, ils vont voir l'intérêt de cette colline et ils vont voir également l'intérêt de Rome vers 620 avant J.C. (la légende parle de 753 avant J.C. avec Romulus et Rémus). Rome s'appellera pour les romains: Urbs (ville), le centre de civilisation.

Le Roi qui va prendre la tête sera un roi étrusque donc étranger pour les Romains. Ce roi a besoin d'être obéit: il a pour cela le pouvoir de commander pour être obéit: l'impérium, et il a le pouvoir de faire exécuter les sentences de Justice, le Roi aura un rôle particulier des organisations judiciaires de Rome, il va organiser le procès en permettant le déroulement, il n'a pas l'initiative du procès qui revient à un homme privé. La personne qui prend l'initiative est le demandeur au procès.

Ce demandeur doit obtenir une action c'est à dire l'autorisation d'agir et la forme primitive du droit à Rome est le droit d'agir, le droit des actions, des situations protégées par la justice. La procédure est la jus actionum, à chaque époque correspondra un élargissement du droit des actions, il appartient au roi d'accorder ou non la possibilité d'ouvrir un procès: droit de cas d'espèce, et non un droit théorique. La théorie du droit apparaîtra à la période classique c'est à dire au 1er siècle avant J.C.

Le droit d'origine appartient aux Romains, c'est un droit de citoyen, à Rome, le droit privé est un droit civil, on les appelle les Quirites. Le droit quiritaire est synonyme de droit privé romain. Ensuite, il y a les Romani et avec la citoyenneté crée en 620 avant J.C. toutes les populations sur les collines sont devenues romaines donc Quiritaires; les étrangers sont les Pérégrins, ils sont peu nombreux à l'origine et n'ont pas accès ni aux tribunaux romains, ni au droit romain.

B.    Le prêteur organise le procès.

1.     Le prêteur est le magistrat chargé de l’organisation des procès à Rome.

C'est la personne chargée d'organiser ces procès lorsque la royauté a été chassée en 509 avant J.C. de Rome et remplacée par deux personnes: les consuls. Le régime est le consulat pour éviter la tyrannie d'une seule personne. Ce sont les premiers magistrats de Rome. C'est un citoyen plus grand que les autres, qui a aptitude à les gouverner, il est au-dessus des autres car il reçoit un pouvoir particulier: le pouvoir de commandement: l'impérium, qui est le droit d'organiser les procès et la procédure donne aux citoyens des actions pour aller en justice.

Les consuls sont donc obligés de se doter de personnes qui sont là pour les aider. La 1ère phase sera celle de l'organisation proprement dite du procès: la phase "in jure" où on prévoit le déroulement. Le magistrat organise l'ordre. Ensuite, c'est la phase "in judicio", c'est la phase judiciaire, c'est à dire qu'il n'y a plus de magistrats, mais une autre personne privée choisit par les parties aux procès et par le magistrat: le juge; c'est lui qui rendra la sentence à la mort du procès.

Cette organisation du procès va permettre d'augmenter le nombre des actions en justice et de développer la procédure. On estime de plus en plus à Rome que tout ce qui est secret doit être révélé aux citoyens romains. On souhaite le mettre par écrit en gravant sur des tablettes. Les principales dispositions soit des procès, soit du droit en formation, après de vives luttes sur ce sujet ont finit par obtenir une première disposition écrite.

C'est une loi qui sera la référence de l'ensemble du droit romain jusqu'à Justinien: la loi des 12 tables de 451 avant J.C. qui regroupe le droit pénal, le droit familial, le droit des successions, une partie de la procédure romaine. Elle est très importante pour les classes sociales romaines, pas les nobles: les plébéiens par rapport aux patriciens. Les plébéiens obtiennent en 367 avant J.C. la possibilité d'être consuls, or comme les consuls peuvent entrer au Sénat de Rome lorsqu'ils ont terminé leur année de consulat, ils ont accès à toutes les fonctions importantes de Rome à partir de 367 avant J.C.

 

Le Sénat est une assemblée de magistrats, c'est à dire les seniors. Cette nouvelle magistrature va s'appeler la prêture, il y aura un démembrement du consulat, il n'y a en 367 avant J.C. qu'un prêteur parce que son pouvoir s'exerce uniquement à Rome. Ce prêteur urbain s'occupera des procès, il est titulaire de l'impérium.

2.     Le prêteur urbain n'est pas à Rome et ne sera pas le seul magistrat chargé de la fonction judiciaire et de la jurisdictio.

Il est compétent pour les procès qui se déroulent à Rome dans l'urbs entre les citoyens romains. Il ne peut pas être compétent pour les citoyens étrangers or les conquêtes de Rome commence au 11e siècle autour de Rome dans le latium. Les Quirites sont les latins et les urbains. Les conquêtes progressives vont faire que le droit Romain s'implante en Italie. Les Pérégrins vont venir à Rome en nombre de plus en plus grand et des conflits romains-étrangers vont se créer.

Pour y faire fasse, on crée un autre prêteur: le prêteur pérégrin dès 242 avant J.C. et qui est compétent pour les procès qui opposent des étrangers entre eux ou qui opposent des romains à des étrangers. Il y aura des magistrats tous chargés de la police urbaine au sens des marchés. La police municipale ayant un rôle fondamental à Rome pour le contrôle de la vente des animaux et esclaves, s'appelle l'Edile.

La magistrature est l’édilité, elle se situe au-dessous de la prêture. Les édiles n'ont pas l'impérium, ils n'ont pas d'armée mais un pouvoir de police: le coercitio c'est à dire le pouvoir d'infliger des amendes et de pratiquer des saisies. Les édiles qui auront un pouvoir judiciaire, ce sont les édiles curules car ils ont le droit de s’asseoir sur une chaise en ivoire pour rendre le jugement sur une chaise curule.

Il existe aussi des magistrats qui vont s'installer en province: les provinces conquises. Ces magistrats sont des anciens consuls ou anciens prêteurs à Rome. Ces proconsuls ou gouverneurs de province vont utiliser une procédure particulière liée à leur impérium administrative qui ne connaît pas la division du procès en deux phases. Cette procédure est plus courte et passer à Rome au 3e siècle. La procédure extraordinaire va supplanter la procédure formulaire: le procès s'effectue en une seule phase et il y a une fusion entre deux personnes: le juge et le magistrat. C'est donc une fonction publique qui rendra la justice à Rome.

§2. Le formalisme règle la phase in jure du procès.

A.    Le rituel s'accomplit devant le prêteur.

1.     Le rituel le plus utilisé est celui du sacramentum. Le sacramentum est appelé action de la loi générale (legis actio generalis), toutes les procédures formalistes sont des procédures légales.

C'est la plus ancienne procédure de Rome qui peut être utilisée pour toutes sortes de litiges. La procédure formaliste équivaut à la procédure des actions de la loi. Le sacramentum est la procédure la plus générale qui peut être utilisée pour les biens et les créances, c'est à dire pour les obligations. Elle va permettre de récupérer une créance et aux créanciers, d'être en justice contre leur débiteur.

Il faut que les deux parties se retrouvent face à face par rapport aux magistrats. Il y a un problème de comparution du défendeur (le débiteur au procès), en effet quand il ne veut pas venir, le demandeur peut forcer le défendeur à venir. C'est un procès privé et le texte romain indique l'utilisation de la force. Le procès est donc une initiative privée et il s'agit d'une procédure qui relève des parties et non pas des magistrats.

On peut aussi indiquer le problème d'un défendeur qui ne peut pas venir au jour indiqué, alors, on trouve un autre jour: c'est l'idée de la caution personnelle c'est à dire le vindex, une personne qui accepte de garantir que le défendeur comparaîtra plus tard. Ce n'est pas un représentant parce que le droit romain ne connaît pas pendant longtemps la représentation judiciaire. Il fait comme si c'était un otage, et si le défendeur ne vient pas, le vindex sera traité comme un débiteur insolvable et sera mis en prison voire exécuté après 60 jours.

Par la suite, on enlèvera l'exécution du vindex et on la remplacera par une caution en justice. La caution est trouvée dans la famille, tout comme le vindex. Il faut voir qu'il y a une sorte d'accord implicite dans le procès. Chacune des deux parties va pouvoir unir l'instance, c'est à dire commencer le procès en procédant au rituel obligatoire pour pouvoir poursuivre le procès. Ce sont les rituels de gestes et paroles. Si le défendeur n'exécute pas le rituel, il empêche le procès de commencer, on considérera que le procès n'aura pas lieu et qu'il a perdu son procès.

Quand le demandeur et le défendeur ont fait le rituel, ils expriment tous les deux une prétention similaire. Ils prononceront les mêmes paroles et accompliront les mêmes gestes pour affirmer dans le droit des biens qu'ils sont propriétaires ou soit dans le droit des obligations que l'autre est débiteur.

Le thème du sacramentum recouvre le serment sacré de dire chacun la vérité et celle des deux personnes qui aura réclamé un droit à tort devra payer une forte amende: elle équivaut à une peine qui va au trésor public, c'est à dire l'état Romain en formation car le serment a été fait devant les dieux romains. Le parjure encourt une sanction lourde.

2.     Il existe d'autres procédures pour réclamer des choses ou des créances : la judicis postulatio - la condictio.

Elles ne sont pas générales: la judicis postulatio est la sanction de la loi qui est possible dans certains cas spécifiques. On l'utilisera pour certaines créances et surtout dans le droit des biens pour ce qui concerne les passages de terres et les bornages de parcelles. Ce sont les actions qui relèvent du bornage et du partage. La procédure la plus simple se fait devant le prêteur, le demandeur va inviter son adversaire à reconnaître sa dette, et si le défenseur ne reconnaît pas cette dette, on rentre dans la seconde phase du procès, la phase in judicio.

La condictio peu à peu remplacera le sacramentum car la procédure est moins lourde. Elle se crée entre le 2e et le 3e siècle avant J.C. à un moment où Rome veut accélérer la justice quand le commerce augmente. La condictio va s'appliquer aux créances de sommes d'argent et aussi pour les créances de ce qu'on appelle les corps certains (corps déterminé en nature, en qualité et en quantité).

A l'origine, elle s'applique à de marchandises et des esclaves. Le demandeur interroge le défendeur devant le magistrat sur la réalité de la dette. Si le débiteur reconnaît la dette, il doit la payer; sinon le demandeur va l'assigner à comparaître devant le magistrat dans les 30 jours qui suivent. On passe à la phase in judicio du procès. La condictio n'indique jamais la cause juridique du procès c'est à dire la cause sur laquelle le demandeur vient au procès. C'est la procédure abstraite.

B.    La nomination du juge et la phase in judicio au procès.

1.     Le prêteur nomme un juge qui est un particulier, mais un notable.

C'est l'idée que le magistrat qui a organisé la phase in jure, va terminer cette phase en désignant un juge. Sous la République romaine, on ira chercher comme personne connue, honorable, dont la sentence peut être acceptée dans les parties, des hommes influents qui ont eu un rôle politique dans la cité: les sénateurs romains. Les juges peuvent cautionner les dettes. Dans la plupart des cas, le procès se déroule avec un seul juge.

Parfois, il y a un collège de juge et des décisions collégiales; c'est le cas des atteintes aux personnes. Ensuite, le prêteur prend à témoin les assistants sur la place publique que les formalités ont été faites qu'elles ont été bien accomplies et qui conclue la phase in jure. Pour cela il dit "litis contestatio" pour conclure. Le rôle de la litis contestatio se situe dans la phase décisive car avec cette dernière, on va fixer les éléments du procès, c'est à dire les prétentions des parties de rien ajouter ou de soustraire. Les parties sont tenues d'accomplir la seconde étape. En plus elles ont le droit d’accueillir une sentence du juge nommé.

La première thèse indique que le prêteur à un rôle très actif dans la procédure, il indique le droit aux parties et joue son rôle de jurisdictio, qui manifeste par l'ouverture du procès, son organisation, la nomination du juge. L'autre thèse minimise le rôle du prêteur et met l'accent sur le fait qu'il n'a pas l'initiative du procès. Le prêteur peut-il refuser une action? Il ne peut la refuser lorsqu'un demandeur se présente parce que son rôle et d'organiser les procès et c'est une obligation d'ouvrir l'instance si les personnes privées la lui demande.

2.     La phase in judicio ne comporte aucun formalisme. Pour l’exécution de la sentence, on peut utiliser dans certains cas la manus injectio ou la pignoris capio. Le passage à la procédure formulaire se fait graduellement, il est entériné par les lois Aebutia (120 avant J.C.) et Julia (17 avant J.C.). ;

Quand le juge est nommé, 3 jours après l'ouverture, si l'une des deux parties ne vient pas, elle perd le procès. On va examiner le fond de l'affaire: il n'y a aucun formalisme ou rituel. Chacune des parties fournit les preuves qu'elles souhaitent présenter. On voit les avocats pour aider les parties. Il y a des personnes qui assistent. Pendant longtemps, les romains ont tenu à la rapidité du procès.

Le juge va se forger une opinion librement; il n'est pas tenu par aucunes des preuves apportées. Il peut exceptionnellement refuser de juger s'il croit qu'il n'a pas tous les éléments, c'est le cas pour les délits car question d'ordre public. Il existe des problèmes sur la valeur des sentences car le juge est une personne privée. La sentence est l'opinion du juge, son intérêt et d'exécuter la sentence et le juge qui a le pouvoir de prononcer n'a reçu aucun pouvoir pour faire exécuter la sentence. A l'origine, le demandeur devait forcer le défendeur.

Dans la procédure du sacramentum, l'exécution de la sentence est facilitée par l'existence des cautions. Il y a toujours des personnes engagées pour exécuter la sentence: c'est l'idée des débiteurs insolvables. Dans les autres procédures, ou bien on introduit volontairement les cautions, ou bien le gagnant du procès aura à sa disposition des procédures nouvelles: les voies d'exécution.

La manus injectio (mettre la main sur) montre la possibilité pour le gagnant de s'emparer de la personne du perdant dès 30 jours après l'énoncé de la sentence si elle n'est pas exécutée. Il va le traîner chez lui, dans une prison privée et on donne alors 3 mois à la personne pour payer. Son débiteur garde son patrimoine éventuel et pourra rembourser sur celui-ci et s'il ne peut pas, ou ne veut pas, il doit trouver quelque chose.

Le créancier doit pendant cette période déclarer à trois reprises qu'il y a un débiteur chez lui. S'il paye, il est libéré sinon il est insolvable et peut être tué ou devenir esclave. Si cette manus injectio est tellement efficace qu'elle reste au delà de procédure formaliste. Par la suite on interdira de tuer le débiteur.

La pignoris capio (procédure gage) est la prise de la totalité ou d'une partie du patrimoine pour se rembourser sur la valeur de la chose. Mais il est possible que dans certains cas,