LE COUP D'ETAT PERMANENT

 

I.   Les premières élections du Directoire.

Elles ont été très orientées car la Convention avant de se séparer avait pris soin de voter le fameux décret des 2/3 qui prévoyait expressément que lors des prochaines élections, on devait retrouvait dans les nouvelles assemblées les 2/3 de la Convention. Il faut donc tenir compte de l'influence mécanique, la composition du 1/3 restant. Les élections ont marqué un grand nombre d'abstention, on considère environ 30.000 personnes pour toutes la France. 

Dans le 1/3 élu de "manière libre", le choix des électeurs s'est porté vers des hommes modérés et même vers des partisans résolus d'un retour à l'Ancien Régime. Il y a en octobre 1795 l'apparition de députés ouvertement royalistes. Dans les deux autres 1/3 portant d'anciens conventionnels, ce sont souvent des royalistes donc une évolution politique nette vers le retour à l'Ancien Régime. 

Quand aux 5 directeurs, le Conseil devait dressé une liste de 50 personnes parmi laquelle le Conseil des anciens devait choisir 5 directeurs. Le premier est La Revellière-Lépeaux, députés d'Angers chargé des questions relatives à l'instruction et aux affaires religieuses. Ensuite Le Tourneur, ancien militaire, député de la Manche chargé des affaires relatives à la guerre. Reubell, ancien avocat et président de la constituante chargé des affaires diplomatiques. 

Il y a aussi Sieyès qui refuse et sera remplacé par Carnot, ancien militaire et ancien député à la Convention originaire du Pas de Calais. Enfin Barras, ancien vicomte sous l'Ancien Régime ., ancien officier élu du Var à la Convention distingué lors du siège de Toulon contre les anglais, au moment aussi de l'arrestation de Robespierre à l’hôtel de ville de Paris. Il sera le plus influent, et il sera chargé des affaires intérieures. Le Directoire s'est installé au Palais du Luxembourg. 

II.    Les coups de force. 

Les 4 années du Directoire seront marquées par une succession de coups d'états qui ont fragilisé le régime et lui ont fait perdre toute sa crédibilité. 

1.     Baboeuf et la conspiration des égaux. 

C'est une conspiration de type néojacobin, c’est à dire un complot destiné à renverser le régime politique préparé par des nostalgiques du régime de l'an II c’est à dire de l'époque terroriste. Autour de Baboeuf, qui lui même est un journaliste, il y a un certain nombre de membres du courant néojacobin de l'époque qui se réunissent au club du Panthéon de Paris. 

Baboeuf est un grand ancêtre du communisme et il a fait connaître ces thèses grâce à son journal intitulé: "Le tribun du peuple" et ceci, dès le début de novembre 1795. Baboeuf a repris par voie de presse un certain nombre des thèmes développées au moment de la Convention par le courant des enragés avec des attaques contre la propriété intellectuelle. Baboeuf réclamera le retour à la constitution de 1793 et formera un comité insurrectionnel qui rédigera en 1796 "le manifeste des égaux", dans lequel les rédacteurs prônent ce qu'ils appellent l'égalité réelle ou sociale contre l'égalité politique ou juridique qui leur parait insuffisante. 

C'est l'idée favorable à une communauté de biens entre les citoyens, le manifeste est une sorte de déclaration de guerre. Les mouvements insurrectionnels à cette époque en 1796 sont difficiles à organiser car c'est la fin de la Convention. Il a ainsi été procédé aux désarmements des faubourgs parisiens. Baboeuf a essayé d'élaborer un plan de soulèvement qui aurait fait intervenir l'armée. Le projet est découvert par la police, aussi ils ont été arrêtés et jugés, Baboeuf sera condamné à mort et exécuté en 1797. 

2.     La mise en cause du résultat des élections.

Plusieurs coups de force et coups d'état ont lieu en 1797 pour remettre en cause l'élection des députés. D'abord, en septembre 1797, un premier coup de force a lieu contre les royalistes et à pour effet les élections partielles du printemps 1797 qui ont eu pour résultat de voir arriver dans les conseils près de 170 députés ouvertement royalistes. Les directeurs ont contesté ces résultats ne voulant pas gouverner avec une majorité royaliste, si bien que par la force, surtout militaire, un certain nombre de députés royalistes ont vu leur élection annulées et l'opération a porté sur 200 députés. 

En 1798, les élections ont connu une abstention massive qui sanctionne le coup de force de 1797 car beaucoup aurait voté royaliste, mais ils se sont abstenus. On a invalidé plus de 100 députés jacobins. En 1799, a lieu un nouveau coup de force des jacobins, c'est à dire des conseils contre les directeurs, les jacobins obtiennent l'annulation du directeur Treirhard puis ils obtiennent la démission de La Revellière et de Merlin de Douai. Le régime politique est instable. 

3.     Le coup d'état de Napoléon Bonaparte du 18-19 Brumaire An VIII (9-10 novembre 1799).

Le régime du Directoire malgré les subtilités de l’an III s'est révélé en pratique invivable et de ce fait, ce régime est devenu très impopulaire, non seulement en raison de cette instabilité politique, mais aussi du maintien de la guerre et du développement de la corruption. Ce problème économique est lié à la dépréciation de l'assignat et certains hommes politiques ont compris qu'il fallait essayer de changer ce régime et stabiliser la Révolution. 

En effet, cela fait 10 ans que la Révolution a commencé, il y a eu une rupture entre ceux qui considère qu'il faut maintenir les acquis révolutionnaires et ceux qui considère qu'il faut revenir à l'Ancien Régime . Le pays aspire un certain retour à la paix au moins intérieur, et parmi ces hommes politiques, on retrouve Sieyès, qui a d'abord refusé de siéger au Directoire. Il a finalement accepté en mai 1799 de faire parti du Directoire. 

Sieyès est un spécialiste des projets constitutionnels et aura tout pour déguiser le changement de régime sous des apparences juridiques et révolutionnaires. Il a compris qu'il fallait trouver un homme qui incarne le changement de régime et Sieyès a cherché parmi les généraux et militaire, celui qui pourrait réaliser ce coup d'état. Joubert étant mort pendant la campagne d'Italie, il y eu Moreau qui se déroba et c'est finalement Bonaparte qui a accepté. 

Bonaparte présente pour Sieyès un certain nombre d'atout indéniable. Il est bien vu des révolutionnaires, il n'est pas suspect d'être hostile à la Révolution car la carrière militaire de Bonaparte doit beaucoup à ses amitiés jacobines par exemple au frère de Robespierre. Les origines familiales de Bonaparte sont plutôt la petite noblesse corse. Bonaparte est auréolé de succès militaire. Par ailleurs, son frère préside le Conseil des 500. 

L'entrevue décisive entre Sieyès, Bonaparte, Talleyrand et Fouchet, qui est alors ministre de la police, a lieu début novembre 1799. Il s'agissait d'abord d’obtenir la démission des directeurs et d'obtenir à la suite de vote le sacrement des deux assemblées et de mettre en place une commission chargée de rédiger une nouvelle constitution. 

Le premier projet s’avérera difficile, le premier acte est le 18 Brumaire 1799, le Conseil des Anciens est convoqué, Sieyès obtient une majorité favorable. On effectue un transfert du corps législatif pour éviter des soulèvements populaires. Bonaparte est chargé de protéger la représentation nationale, le Conseil est d'accord pour les transferts mais tandis que Barras accepte de démissionner, Gohier et Moulin refusent , ils sont donc consignés dans le Palais du Luxembourg.

Le 19 Brumaire 1799, c'est le deuxième acte, les conseils sont réunis à Saint Clou sous la protection de Bonaparte. Le conseil des Anciens prend acte en bloc de la démission du Directoire. Au Conseil des 500 devant lequel Bonaparte se présente, les choses tournent mal, il est accusé d'avoir prêté son concours à un coup d'état. Il perd son sang froid. Son frère qui préside l'assemblée essaye de calmer les débats, mais certains députés demandent la mise en arrestation de Bonaparte. 

Mais les députés sont entourés de 6000 hommes qui sont les troupes de Bonaparte, et voyant que les débats deviennent dangereux, les officiers font marcher les soldats contre l'Assemblée. La salle va être nettoyée et le coup d'état se transforme en coup d'état militaire. Comme on veut préserver une façade légale, on essayera de retrouver les députés qui s'étaient égayés aux alentours. 

Réunis, ils vont décider d'ajourner le corps législatif. Ils vont remplacer l'exécutif qui avait démissionner par 3 consuls provisoires: Bonaparte, Sieyès et Roger Ducquot. On met en place une commission pour rédiger une nouvelle constitution. C'est dans ces conditions que le Directoire disparaît et parvient au pouvoir un homme qui restera jusque 1814.