Ce sont des actes licites entraînant des obligations dont la sanction est celle des actions reipersécutoires. Il y a à Rome un certain nombre d’actes permis par la loi qui ne sont pas liés à des obligations contractuelles, mais qui sont sanctionnées en justice par les actions même du contrat (réipersécutoires) : ce sont des actes qualifiés de quasi-contrat privilégiant la notion de sanction. La dénomination passe dans le droit français (article 1370 et 1371 du code civil) ; elle est toujours critiquée, mais elle subsiste. En droit romain, il y a beaucoup d‘opérations économiques entraînant des obligations pouvant être qualifiées de quasi contractuelles.

 

Section 1: l'enrichissement injuste est un enrichissement sans cause.

§1. Sa sanction est liée à l'absence de cause.

A.    L'enrichissement injuste est contraire à l'équité.

1.     L'équité est une notion du droit grec. La théorie repose sur l'idée de la restitution, on dira la répétition de l’indu.

Cette notion grecque s’introduit à Rome : aequitas = égalité entre les individus. Pour les grecs, l’équité doit se traduire par l’idée de justice qui doit tenir la balance égale entre les parties. A Rome, on va considérer qu’il est injuste d’augmenter son patrimoine sans raison et juste de restituer ce que l’on aura reçu en trop sans raison (l’indu). Progressivement, une théorie de l’enrichissement injuste sera élaborée par le droit romain : la création serait jurisprudentielle (2e siècle avant J.C.), la théorie apparaît au 1er siècle avant J.C. et à la fin de la république romaine (1er siècle après J.C.), il y a à Rome une construction de l’enrichissement injuste reposant sur la notion de répétition de l’indu : il y a une action en justice liée à un acte unilatéral : la condictio.

2.     D'autres romanistes ont soutenu la thèse d'une volonté d'élargissement de la procédure de la condictio.

La théorie de l’enrichissement injuste serait liée à la procédure. Il faut développer et permettre à tous d’utiliser la condictio qui a remplacé progressivement le sacramentum à la fin de la période formaliste (2e siècle à 1er siècle avant J.C.). La condictio se caractérise par l’absence de cause, la procédure correspondant exactement à l’enrichissement sans cause : il n’y a pas d’indication même de la raison poussant à faire un procès.

B.    L'action utilisée n'indique pas la cause dans la formule, c'est une condictio.

1.     La condictio est une action abstraite, c'est une action personnelle et de droit strict (condictio / condictio certae rei et certae pecuniae / condictio ob rem dati).

C’est une action personnelle : le nom du défendeur est dans la formule (dans une action réelle, il n’y a jamais le nom du défendeur). C’est également une action de droit strict car le juge ne peut pas moduler la sentence, elle correspond uniquement en cas de contrat unilatéral. Ainsi c’est une action abstraite car il n’y a pas de démonstratio de la formule.

A l’origine, la condictio est une procédure qui se substitue progressivement au sacramentum à la fin des actions de la loi. Dans la procédure formulaire, à ce moment-là, la condictio devient une action en justice avec deux grandes branches d’origine : condictio certae réi et condictio certae pecunae. Il y a application du mutuum sous les deux formes.

Sous le contrat littéris il y a uniquement condictio certae pecunae. Dans les contrats innomés, il y a extension de la condictio quand le créancier choisit l’action en restitution (condictio ob rem dati) et de mettre fin au contrat (condictio propter). Or la condictio ob rem dati est reliée pour les juristes à l’enrichissement sans cause : le droit romain va faire appel à l’action en justice appropriée à ce cas (la condictio) et on va créer de nouvelles condictiones correspondant à la sanction de cet enrichissement

2.     La condictio et l'enrichissement injuste: condictio après le sacramentum / condictio certae rei et certae pecuniae / condictio incerti.

On trouve la totalité de la condictio sous la procédure des actions de la loi et formulaire. Sous l’empire, ces condictiones liées à des choses certaines vont être complétées par l’apparition d'une condictio liée à une chose incertaine. Ainsi, s’il manque un élément de détermination (nature, quantité, qualité), on parle de la condictio incerti car la rédaction de la formule sera une rédaction incertaine (intentio de la formule) qui présente les prétentions du demandeur.

Les juristes vont pouvoir élaborer une théorie plus abstraite de la répétition de l’indu. Justinien se servira de cette classification à la fin du droit romain, il y a une apparition dans le digeste des actions définitives permettant de sanctionner un enrichissement sans cause légitime.

§2. Les diverses actions en répétition de l’indu.

A.    L'action principale est la condictio indebiti.

1.     Elle sanctionne la créance en restitution de celui qui a payé par erreur ce qu'il ne devait pas. Il faut trois conditions: un paiement, un indu et une erreur.

C’est l’idée que l’erreur est fondamentale : quelqu’un a forgé une dette qu’il n’aurait pas du payer à ce moment-là. Il faut donc un paiement : il faut une prestation (acte positif) destiné à éteindre une obligation (idée de l’exécution de l’obligation) : remise d’une somme d’argent : notion d’indu.

Pour les juristes il y a 3 cas :

*cas où la dette n’existait pas : elle n’a jamais existé ou elle est déjà atteinte ou elle n’existe pas encore (problème des dettes conditionnelles quand la condition n’est pas encore arrivée). Elle ne fait pas partie de l'indu et c’est le fait de payer pour acquitter une obligation naturelle (dettes contractées par les esclaves, le fils de la famille sans capacité juridique).

*cas de l'indu : fait que la personne qui a payé n’était pas le véritable débiteur.

*cas du paiement qui est fait à une autre personne que le véritable créancier.

Les juristes préciseront que l’erreur ne doit pas être grossière donc excusable, quand le paiement a été fait dans d’autres conditions, on ne peut exercer l’action liée à indu notamment quand le paiement aura été fait en sachant que la dette n’existe pas. Le droit romain traitera de cela en libéralité : il n’y a pas de recours en justice : il n’y a pas de preuve contraire possible en justice (donation).

2.     Seul le montant de l'enrichissement effectif sera demandé par celui qui a payé à tort celui qui a reçu ce paiement.

 Le droit romain va décider que l'indu peut être répété au seul montant de l’enrichissement réel : celui qui a payé à tort va demander à celui qui a reçu à tort. 3 problèmes se posent dès lors :

*le problème des fruits de la chose : on peut réclamer les fruits s’ils sont venus à l’échéance car ces fruits sont l’accessoire de la chose.

*le problème de la perte de la chose : s’il y a une perte par cas fortuit sans faute, il n’y a pas de possibilité de réclamer la répétition de l'indu (possibilité d’autres actions...). S’il y a une faute, l’action est basée sur la faute elle-même.

*le problème des frais occasionnés par la chose : ils sont déduits de la somme à restituer. Le domaine est quasi contractuel : indu n’est pas traité dans le domaine contractuel ou quasi contractuel. Il n’y a pas de fraude de la personne ayant reçu à tort, il y a simplement une erreur. La condictio est donnée en cas d’enrichissement injuste que s’il y a bonne foi de part et d’autre : erreur excusable.

B.    Il existe des condictiones pour des cas spécifiques.

1.     La condictio ob turpem causam.

Elle est donnée pour les causes immorales : dans les cas d’enrichissement immoral (quelqu’un se fait remettre de l’argent pour ne pas commettre un délit, restituer une chose qui a été volée). Elle est donnée à chaque fois que la cause future est déshonorante pour l’une des parties, que cette cause soit par la suite réalisée ou non.

2.     La condictio ob injustam causam.

A l’origine, elle n’existe pas dans le Digeste, mais elle existe dans le code : nouvelle condictio pour sanctionner un certain nombre de paiements de l'indu entraînant un enrichissement pour cause moins grave que l’enrichissement immoral mais devant être sanctionnée. Il y a deux cas essentiels dans les textes : exiger des impôts supérieurs au taux légal (impôt usuraire) ou consommer des fruits de la chose quand elle appartient à autrui, donc on devrait la restituer mais pas les fruits (possession de mauvaise foi). 

3.     La condictio sine causa.

Elle concerne tous les cas d’enrichissement injuste : tous les cas ne sont pas sanctionnable, seulement les cas où les parties ont un lien juridique entre elles. La propriété est la possession de bonne ou mauvaise foi. Si c’est de bonne foi, quelqu’un a acquis une chose et il croit l’avoir acquis du vrai propriétaire ; en réalité, il l’a acquis d’une autre personne, il ne le sait pas ; il n’est que le possesseur de bonne foi : il fait des impenses sur la chose acquises, or le vrai propriétaire va faire une action en revendication. Il y a une restitution et donc de l’enrichissement de toutes les  impenses faites (cas d’enrichissement injuste). Il n’y a pas de possibilité pour le possesseur de bonne foi de récupérer la valeur des impenses car il n’y a pas de rapport juridique initial entre le possesseur de bonne foi et le vrai propriétaire de la chose.

 

Section 2: la gestion d'affaires marque une ingérence dans les affaires d'autrui.

§1. Il s'agit d'éviter un préjudice à autrui.

A.    La gestion d'affaires est d'abord un acte de fait.

1.     C'est l'acte de celui qui intervient dans les affaires d'autrui sans que cet autrui lui en ait donné mandat.

Il y a une personne qui n’a reçu aucun mandat, il n’y a pas de contrat initial, mais il y a une intervention dans des affaires d’autrui qui n’est pas justifiée par une décision légale (c’est le cas de tutelle, curatelle, on peut intervenir où a loi le permet).

2.     L'acte de gestion peut porter sur l'ensemble du patrimoine ou sur une affaire particulière, ce peut être un acte matériel ou juridique.

Il y a la gestion d’affaire générale et aussi on peut intervenir sur une affaire particulière avec la gestion d’affaire spéciale. La nature des interventions est variée : c’est l’idée de l’intervention matérielle ou juridique. En ce qui concerne l’intervention matérielle : réparation d'un immeuble ou juridique : paiement d’une dette d’autrui arrivant à échéance pour éviter la saisie sur le patrimoine. Il faut éviter à une personne de ne pas se présenter en justice au jour imparti : elle serait à l’origine de la gestion d’affaire.

B.    Un élément intentionnel accompagne l'élément de fait c'est la volonté du gérant d'affaires de faire naître une obligation à la charge du géré.

Pour qu’il y ait une gestion d’affaire (quasi-contrat), il faut que la personne s’introduise dans les affaires d’autrui ne le fasse pas à titre de libéralités, il faut qu’il y ait une volonté de faire naître une obligation à la charge de la personne dont on a préservé le patrimoine : création d’une action en justice permettant de réclamer le paiement de l’intervention.

§2. La gestion d'affaires peut devenir équivalente à un mandat.

A.    Le gérant doit remplir sa tâche en bon administrateur et rendre compte au géré. Celui-ci aura l'action de gestion d'affaires directe (negotirum gestorum directa).

Le gérant intervient de lui-même, il a une obligation de faire sa tache en bon administrateur : la responsabilité ordinaire du bon administrateur engagée par la faute légère. En fin d’opération, il doit faire parvenir tout le bénéfice de l’opération au géré. L’obligation ainsi créée persiste malgré la matière, la disposition du géré (à la différence du mandat : contrat intuitu personae). Il faut une action de gestion d’affaire directe : de bonne foi, comme s’il y avait eu contrat à l’origine donnée au géré (ou ayant-droit) pour obtenir tout bénéfice de l’opération.

B.    Le géré doit indemniser le gérant de ses frais, celui-ci dispose de l'action de gestion d'affaires contraire (negotiorum gestorum contraria). Si le géré ratifie les actes du gérant, la gestion d'affaires est considérée comme équivalante au mandat.

La gestion d’affaire est contraire. C’est une action pour être indemnisé des frais de gestion : le géré devra assumer toutes les obligations que le gérant a pu contracter à son bénéfice. L’obligation prend fin au moment où le géré ratifie les actes du gérant, la gestion de celui-ci ne peut plus être critiquée. Au 3e siècle, L’ulpien va définitivement faire admettre que quand cette ratification a été faite, la gestion d’affaire devient égale au mandat, mais ne change rien à la classification des quasi-contrats, car il n’y a pas de contrat initial.