LA DECISION D'OUVERTURE

 

Section 1 : l’ouverture de la procédure

           I- Les modalités de la saisine

A- La saisine par le débiteur

Le débiteur dépose son bilan. Cela doit être fait dans les 15 jours de son état de cessation des paiements (art L3 al 2). Si c’est une personne physique, elle doit se présenter elle-même sauf mandat spécial. Si c’est une PM, c’est à l’organe d’administration de le décider, sous réserve de la consultation des délégués du personnel ( délit d’entrave).
Il faut signer une déclaration de cessation de paiement, en l’accompagnant de documents montrant cet état (s’il manque certaines pièces, il faut indiquer le motif). Cet acte est analysé comme un aveu, mais ce n’est pas un acte irréversible (seulement, l’on alerte le greffier).

B- La saisine sur assignation d’un créancier

Ceci est possible quelque soit le montant de la créance. Mais, la L94, réticente, a multiplié les conditions :
_ la demande ne doit pas être comminatoire, c’est à dire en vue d’obtenir paiement. La demande d’ouverture ne peut donc être une demande subsidiaire de demande de paiement.
_ le pouvoir réglementaire exige que le créancier démontre les voies d’exécutions qui sont restées vaines.
Il s’agit d’une assignation de type classique.

C- La saisine d’office ou sur demande du procureur

C’est l’art. L4 al 2. Chaque tribunal de commerce a une cellule de prévention et une cellule de saisine. Le président se renseigne sur la situation des entreprises de son ressort et peut convoquer d’office le débiteur. Il doit rendre une ordonnance en indiquant les faits le conduisant à penser que l’entreprise est en état de cessation des paiements. Le débiteur convoqué se présente en chambre du conseil.

         I I-Les moyens d’information du tribunal

Art. D12 et D13 : déclencher une enquête préalable. Le tribunal commet un juge (qui en pratique nomme un mandataire) avec mission de recueillir tous renseignements sur la situation économique et sociale de l’entreprise, de dresser un rapport adressé au tribunal, remis au débiteur et discuté en chambre du conseil contradictoirement.

A-Le jugement d’ouverture
           1.Modalités d’intervention
Le tribunal statue sur l’ouverture de la procédure après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur, le délégués du personnel, toute personne dont l’audition lui paraît utile. Puis il prononce l’ouverture de la procédure et désigne un représentant des créanciers et un mandataire. Le changement d’organe est possible sur demande de l’intéressé ou pour des raisons disciplinaires.

          2.L’option entre le redressement et la liquidation
sous le régime de la L85, il existait un prononcé du redressement, puis, si aucun plan ne pouvait être présenté, l’on passait à la liquidation. Le législateur de 94, plus réaliste, ordonne la liquidation immédiate quand :
_l’entreprise a cessé toute activité (seule vraie condition en pratique)
_ ou quand aucun plan n’apparaît possible.

B-Les effets du jugement : publicité, exécution provisoire
Le jugement prononçant le redressement ou la liquidation judiciaire est erga omnes et produit des effets la 1° heure du jour où il est rendu. Il est exécutable immédiatement, sauf en cas de faillite personnelle. L’appel, par le débiteur ou le créancier, est recevable dans le délai de 10 jours. Le jugement , publié au BODAC, peut faire l’objet d’une tierce-opposition.
 
 

Section 2 : La compétence.

           I La compétence d’attribution

A Les règles générales

L’art L7 donne compétence au tribunal de commerce pour l’artisan ou le commerçant, au TGI pour l’agriculteur ou la PM non commerçante. La société d’exercice libérale, la SA vont au TGI.
Par contre, l’on peut par décret réserver le régime général à certains tribunaux ; mais après réclamations, presque tous les tribunaux de commerce se sont vu reconnaître compétence.
L’art. L7 dernier al. Permet lorsque les intérêts en présence le justifient de renvoyer l’affaire devant une autre juridiction de même nature pour connaître des procédures. Cette procédure de concentration a été depuis 94 étendue à tous les débiteurs sur toute la France :
_au niveau régional, par décision du président de la CA, choisissant entre les 2 tribunaux
_au niveau national, lorsqu’il s’agit d’un groupe de société, le président de la cour de cassation déterminera quelle est la compétence. Mais il se heurte à des réticences, plus la possibilité de casser entre plusieurs entreprises.

B L’étendu de la compétence

L’art. D174 indique que le tribunal connaît de tout ce qui concerne le redressement ou la liquidation, par la règles de la compétence exclusive du tribunal de la faillite. Il s’agit des actions tirées de la procédure, ou ayant une influence sur elle ; par contre, quand il n’absorbe pas la compétence exclusive quel a loi donne à une autre juridiction :
- séparation des autorités administratives et judiciaires
- compétence fiscale
- les conflits du travail
- le TGI pour la propriété, la succession, le partage de communauté.

Dans ce cas, le tribunal de commerce sursoit à statuer.

          II La compétence territoriale

Le tribunal compétent est celui du lieu de domicile du débiteur ou du siège social de l’entreprise (ou le lieu de l’agence pour une entreprise étrangère). Le tribunal s’attache à la réalité du domicile ou siège social, contre les débiteurs cherchant à trouver un tribunal moins sévère.

          III La porté des règles relatives à la compétence

Lorsqu’un tribunal prononce un redressement, cela joue erga omnes, et il est impossible à un autre tribunal de prononcer un autre redressement judiciaire. Il appartient alors au procureur de la république de faire une voie de recours en appel pour annuler la décision. Mais, de fait, la situation peut arriver. La solution est alors de faire des voies de recours contre les 2 décisions auprès des 2 CA. Si elles rejettent ou acceptent toutes 2 leurs compétence, la cour de cassation tranchera.
 
 

Section 3 : procédure et voies de recours

Il y a un particularisme du domaine des procédures collectives, qu’on ne peut soumettre au droit commun. Mais chaque fois qu’il n’existe pas de disposition particulière ou que le juge outrepasse les attributions données, l’on retourne à la règles de droit commun.

           I Le régime des recours-nullité

c’est un recours subsidiaire. Le délai est de 10 jours à compter de la notification. Toute partie en 1° instance peut l’exercer, sinon ce sera la tierce opposition-nullité à condition d’avoir un intérêt distinct de ceux soutenus par les parties de la procédure.

Le critère du recours est très sévère, car il ne s’agit pas de toute violation à l’O.P. (opinion de M. Soinne) mais plutôt c’est :
_ La violation de règles procédurales essentielles
_ L’excès de pouvoir de la juridiction
L’effet du recours : il est dévolutif comme en appel.

           II Les décision susceptibles d’appel ou de cassation

L’art. L71 : " Sont susceptibles d’appel ou de pourvoi :

  • les décisions statuant sur l’ouverture de la procédure, le débiteur, le M.P., les créanciers poursuivants.
  • Les décisions statuant arrêtant le plan de continuation de la part du débiteur, de l’administrateur, du représentant des créanciers, du comité d’entreprise, et MP.
  • les décisions modifiant le plan de continuation : le débiteur, le comité d’entreprise, le M.P. "

Toute autre personne est irrecevable. Les jugements non énoncés répondent au droit commun pour la qualité (délais normaux) tandis que d’autres seront insusceptibles de voies de recours ou suivent un régime très spécifique.

           III Les décisions insusceptibles de voies de recours

C’est la nomination et le remplacement du juge commissaire. C’est surtout les décisions par lequel le tribunal statue sur les ordonnances du juge commissaire, tant qu’il reste dans les limites de ses attributions. La loi de 94 a voulu augmenter la transparence des procédures collectives : le M.P. seul peut faire appel des décisions du tribunal lorsque celui-ci se prononce sur les modalités de réalisation de l’actif.

           IV Les décisions susceptibles d’appel de la par du seul procureur

L174 : _les jugements relatifs à la nomination ou au remplacement des organes de la procédure
           _les jugements statuant sur la durée de la période d’observation

L 174 dernier al :
" Ne sont susceptibles que d’un appel soit du P.R soit du cessionnaire ou du cocontractant mentionné à L86 les jugements qui arrêtent les plans de cession d’entreprise. Le cessionnaire choisi par la juridiction ne peut faire appel que si le tribunal lui a imposé des charges supérieurs à celles souscrites. Le cocontractant mentionné à L86 ne peut faire appel que dans la partie du jugement qui emporte cession du contrat."

Cette disposition créé un énorme contentieux. Sa raison est un impératif de rapidité : sauver l’entreprise sans qu’existe de blocage. Mais il existe des problèmes d’interprétations :
_ La notion de dépassement de ses obligations est une notion délicate
_ Le cocontractant de L86 est celui pour lequel le tribunal a prescrit le plan de continuation du contrat. Se pose alors un problème d’indivisibilité, car s’il peut faire appel de la partie qui le concerne, c’est l’ensemble du plan qui est déséquilibré.
_ Compte-tenu de l’aspect restrictif de cet appel, il faut ouvrir un recours-nullité.

Mais quand le tribunal a fait une " décision mixte " ou " à pluralité d’objet ", l’on applique dans ce cas le régime de voies de recours le plus ouvert.